La Bonne Intention

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La Bonne Intention | côté historique

Il est fait référence pour la première fois de cette plantation (située sur la côte Est du fleuve Demerara) sur une carte en 1798, comme appartenant à un certain François Changuion (depuis 1786). On y plantait alors exclusivement du coton jusque dans les années 1820, puis de la canne à sucre (avec une référence dans les registres de 1829) et même du café durant la récolte de 1835.  Ainsi, en 1829 la plantation La Bonne Intention a produit environ 272 tonnes de sucre ; une production de rhum qui aurait alors commencé au 19ème siècle puisqu’il est fait référence de son rhum à l’Exposition Universelle de Calcutta de 1883/1884 ; la plantation La Bonne Intention représentait alors la colonie de Guyane Britannique dans la catégorie rhum avec quelques autres concurrents.

En 1954 la distillerie La Bonne Intention produisait 89 883 gallons de rhum (soit environ 340.000 litres) ; en 1959 on y produisait encore 139.790 gallons (529.000 litres), mais l’année suivante plus aucun chiffre n’est repris dans les registres. La Bonne Intention ferme alors ses portes en tant que distillerie, mais perdurera en tant que sucrerie jusqu’en 2011. Les distilleries de Skeldon, Blairmont et Port Mourant suivront le même sort et fermeront toutes leurs portes entre 1955 et 1965.

LBI | côté embouteillage

Il n’existe aujourd’hui que deux rhums portant le nom de La Bonne Intention, tous deux embouteillés par l’italien Velier : en 2000 sort un premier millésime (1985), et un second (1998) en 2007 ; ils n’ont pas été directement distillés à la distillerie La Bonne Intention mais reproduit à la distillerie Uitvlugt selon le profil aromatique historique. L’histoire nous apprend que la colonne alors utilisée était une colonne Coffey, depuis remplacée par une Savalle à Uitvlugt (l’étiquette du LBI 1998 mentionne d’ailleurs une distillation continue en colonne).

Comme repris dans un précédent article, il ne faut pas oublier qu’après 1960 beaucoup de rhums ont en commun d’avoir été reproduits et réalisés à partir d’alambics plus ou moins similaires (dans le cas où celui d’origine n’existait plus), en essayant de coller au plus prêts aux profils historiques de chaque distillerie (via des tests organoleptiques et chimiques, des modifications diverses et variées afin de reproduire le plus fidèlement possible les températures de distillation, la fermentation, la vitesse de la vapeur hydroalcoolique et l’élimination des impuretés.)

Selon DDL, la marks/le profil LBI correspond à un rhum de caractère moyennement doux mais prononcé. Il existerait aussi une autre marks rattachée à LBI mais encore jamais rencontré : ROM.

source: le toujours excellent article publié par Marco Freyer sur son blog Barrel Aged Mind, traduit en français par Nico du blog Coeur de Chauffe.

 

 

 

La Bonne Intention 1985 / 40°

Un rhum de 15 ans sorti par Velier en 2000, lorsque la fameuse bouteille noire n’existait pas encore. Il s’agit d’une version réduite à 40°, probablement vieillie sous le climat continental. L’étiquette nous apprend à tort que la distillation s’est déroulée à la distillerie La Bonne Intention, alors que celle-ci a fermé ses portes entre 55 et 65.  Précision sur l’étiquette : special cask LBI 961-965.

 

La robe de ce premier LBI est d’un ambré soutenu, tirant sur le cuivre, brillante et huileuse ; un disque flotte en surface, pour nous montrer un peu plus de gras que les jambes exposeront d’ailleurs sans retenue ni gêne aucune.

Au nez, le rhum propose un profil relativement léger, sec et fruité : se mélangent des fruits secs (raisin blond sucré, pruneau), des feuilles de tabac séchées et des notes de mélasse. Le nez apparait très simple et sans réelle complexité, et n’en dévoilera pas d’avantage, si ce n’est un peu de caramel et des notes sèches de fruits à l’eau de vie, et bien loin des noirceurs de certains rhums du genre. Avec le repos le nez va même jusqu’à s’éteindre progressivement.

En bouche, l’attaque est douce et huileuse, et devient rapidement grasse et sucrée, avec beaucoup de fruits secs, d’épices caramélisées et de la mélasse légèrement grillée, du caramel. C’est plutôt sec, sur l’alcool pour un rhum léger qui rappellerait plus les ron que de fiers Demarara, et l’impression de sucre n’arrangera vraiment rien à l’affaire : l’impression d’une sauce caramélisée et sucrée en bouche, tout juste relevée par des épices. La fin de bouche est assez courte, très sèche et alcooleuse, surement brisée par l’impression de sucre en bouche. Damage et dommage.

Il y a sûrement du potentiel dans ce rhum, mais il est malheureusement annihilé par une bonne rasade de sucre qui décidément fait bien plus de mal que de bien à la dégustation. Affiché à 40° il a été mesuré à 35,7 de densité, soit entre 15 et 19gr de sucre par litre. Assez sec avec des notes de sucre et d’alcool, et plus proche d’un rhum liquoreux. Note: 74

 

 


La Bonne Intention 1998 / 55,6°

Embouteillé en 2007 à 55,6°, cet embouteillage est un single cask (comprenez issu d’un seul et unique fût) qui est sorti conjointement avec un Versailles 1998 et un Enmore 1998, tous âgés de 9 ans (de vieillissement tropical). 274 bouteilles sortiront de ce fût unique de La Bonne Intention. Pas de sucre ici, contrairement au 1985.


La robe n’a que très peu en commun avec le précédent rhum, ici elle est acajou et tire sur le rubis, le disque de surface est épais et verdâtre, et le rhum très gras avec des jambes épaisses et collantes.

Au nez, le rhum est riche et concentré, et laisse échapper une odeur fondue, résineuse et sucrée, mêlant fruits secs (pruneau en tête) et notes de tabac et de cuir, ou peut-être de mélasse fumée. Le nez colle littéralement et laisse imaginer sans mal une bouche tout aussi concentrée et résineuse. Arrivent des notes de fruits rouges avec le repos, légèrement acidulés et bercés par une odeur de fumé qui donne à l’ensemble une belle présence. Cette même odeur prendra quasiment toute la place au fur et à mesure que le temps passe, rappelant une mélasse grillée, voire « cuisinée ». L’alcool y est bien intégré.

En bouche, l’attaque est prenante et collante, résineuse comme imaginé, mais fondante : elle colle littéralement au palais, déversant ici des arômes de bois fumé, brûlé, là des fruits secs et confits (pruneaux), du tabac et du cuir tanné et sucré, épicé, le tout dans un ensemble fondu et équilibré et très chaleureux. La bouche va crescendo vers plus d’épices (piment) et de puissance, prend même un air iodé pour une fin de bouche plutôt longue et surtout persistante sur ces notes sombres et empyreumatiques de fumé et de cuir rôti, asséchant progressivement le palais mais rappelant au bon souvenir l’ensemble de la dégustation. Le verre vide est rafraichissant et fruité.

Un LBI qui éclipsera aisément le 1985 qui paraitra bien fade à côté, et deux rhums qui n’auront au final que très peu en commun sur le plan gustatif et aromatique. Ce 1998 est fidèle aux embouteillages Demerara de chez Velier (en tout cas les Demerara brut de fût et au vieillissement tropical), avec un profil concentré et résineux du plus bel effet, mais tout de même moins riche que des rhums plus vieux de quelques années. Note : 86

 

 

 

90 et + : rhum exceptionnel et unique, c’est le must du must
entre 85 et 89 : rhum très recommandé, avec ce petit quelque chose qui fait la différence
entre 80 et 84 : rhum recommandable
75-79 POINTS : au-dessus de la moyenne
70-74 POINTS : dans la moyenne basse
moins de 70 : pas très bon
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