Le BIO en Questions

Très peu répandu dans la culture de la canne à sucre, l’agriculture biologique vise à intégrer les productions dans leur milieu naturel et à revenir aux bases de l’agronomie : c’est la volonté de vivre le quotidien au rythme de la nature, de la préserver en évitant l’utilisation de produits et engrais chimiques de synthèse, en respectant les écosystèmes du sol et de son environnement. Et comme pour les vins bio qui ont déferlé sur nos étals ces dernières années, il faut rappeler que ce n’est ni le vin, ni le rhum, qui sont bio, mais bien le raisin, et la canne à sucre.

Il n’est pas inutile de rappeler que depuis la démocratisation, l‘industrie agro-alimentaire et la grande distribution en ont tué les principes fondamentaux, valorisant une agriculture bio intensive qui n’a de sens, que celui du profit ; Mais il reste néanmoins dans beaucoup de secteurs des gens qui le font de manière raisonnée, par principe, par idéologie, et tout simplement par respect de la terre ; des productions à taille humaine qui nous rappellent à la raison et qui constituent autant de bulles d’air dans une société depuis trop longtemps asphyxiée.

Alors bio, gage d’une certaine qualité ? En tout cas d’un certain respect du produit et de nombreuses valeurs, en gardant à l’esprit que la pratique d’une agriculture raisonnée semble être la façon la plus logique et respectueuse de cultiver les terres, de cultiver nos terres, sans contraintes ni certification.

 


Produits chimiques et rhum

Au-delà de la certification et de la mise en place d’un rhum BIO, la question qui mérite d’être posée est : le rhum est-il impacté par les produits chimiques ? La réponse, pas franchement répandue puisque très sensible pour les filières concernées, est bien évidement oui. Le secteur n’est pas épargné, et parmi les produits utilisés chez nous, il y a principalement des herbicides (Dibroxal, Dicopur, Touchdown, Camix, Mercantor gold, Prowl 400,…), dont l’Asulox est sûrement le plus dangereux, et celui qui prête le plus à polémique:

De dérogation sur dérogation, cet herbicide a été interdit par les autorités sanitaires avant de revenir sur la demande expresse (qui a dit lobby?) des producteurs, qui ne pouvaient pas (ou plutôt plus) s’en passer ; C’est pourtant possible mais la dépendance aux produits chimiques, le gain de temps et d’argent (pas de désherbage manuel ni mécanique) l’emportent souvent sur la raison.

Autre produit montré du doigt : le Chlordécone, un puissant pesticide potentiellement cancérogène utilisé de 1971 à 1993 aux Antilles, pour lutter contre le charançon du bananier ; il n’a pas été utilisé pour la culture cannière mais il a entraîné une pollution des sols, des cultures environnantes, des eaux et des écosystèmes, impactant directement les champs de canne à sucre pour des décennies (pénalisant encore plus fortement les producteurs qui ont pratiqué jadis la rotation des cultures, ou qui ont planté des cannes sur d’anciens champs de bananes).

Retrouve-t’on pour autant des résidus de ces produits chimiques dans le rhum ?
Le rapport CIRAD/INRA de juin 2006 indique qu’un premier test a été réalisé sur le passage de la molécule de chlordécone dans les produits transformés (sucre et alcool). Le transfert s’est révélé positif pour le sucre mais négatif pour le rhum ; pour le reste, et en l’absence d’études, on peut en toute logique s’interroger sur d’éventuelles traces.

Mais dans un dialogue commun et rassurant, politique et correct (et forcément international, car l’argent a rarement de nationalité), tous insistent sur le fait que l’utilisation d’engrais chimiques et de pesticides (insecticides, fongicides, herbicides, parasiticides) serait un moindre mal, voire un bien pour l’industrie, et donc la canne. Au final, il n’y en aurait pas, ou plus, ou alors très peu, dans notre verre (les étapes de fabrication se chargeant d’éliminer la plupart des molécules indésirables). Pour certains, cela justifierait le fait de souiller les terres…question de point de vue. Gardons tout de même à l’esprit qu’au delà d’un gâchis environnemental certain, qui sévit chaque jour un peu plus sur la planète (et dans tous les secteurs), il y a de nombreux ouvriers qui tombent malades, et qui décèdent.

Au Nicaragua, terre du rhum Flor de Cana, mais aussi au Sri Lanka et en Inde (et qui sait où encore), les pesticides tuent dans l’indifférence ; d’anciennes certitudes d’ « insuffisance rénale chronique » se sont progressivement transformées en empoisonnement au cadmium, montrant d’un doigt accusateur les pesticides et les engrais chimiques utilisés dans les champs de canne. 15 ans et 20 000 morts plus tard, rien ne change vraiment, excepté les chiffres d’affaires des compagnies sucrières.

[pour aller plus loin, voici un reportage vidéo, et un article sur le sujet]

 

Pollutions & gestes ECO friendly

Sans vouloir tout mélanger, rappelons ici en quelques lignes, qu’au-delà du bio, certaines distilleries font des gestes responsables en faveur de l’environnement, pour marquer leur différence : par exemple en traitant leur vinasse (le résidu de la distillation) de manière naturelle dans des bassins, avant de s’en servir comme fertilisant dans les champs. Une démarche très louable quand on sait que de nombreuses stations d’épurations ne fonctionnent pas correctement sur les îles, et que les décharges à ciel ouvert existent encore.

Dans le même ordre d’idée, la bagasse pourra servir de paillis, constituer une source d’énergie non négligeable (sous formes de combustibles), ou encore servir de fourrage pour les animaux, de matière première pour le papier, le carton, le textile, et même servir d’isolant thermique. Les résidus de production sont ainsi utilisés et non rejetés sans se soucier de leur impact environnemental.

Autre pollution, le brûlage de champs de canne, qui a été associé à une hausse significative de la pollution atmosphérique dans certains pays. Et pour s’éloigner de nos contrées, rappelons qu’au Brésil (et en Inde), plus qu’ailleurs, il y a de très importantes émissions-carbone dues au transport, conséquences directes d’une production intensive, et qui va de pair avec la dégradation et l’érosion des sols ; sans parler de l’utilisation abondante de pesticides et d’engrais qu’elle implique.

 

Rhum bio, une offre quasi-inexistante

Depuis quelques années, les magasins d’alimentation biologique proposent de plus en plus de références en alcools et spiritueux bio : On trouve dorénavant des whiskies, des vodkas, gins, cognacs, armagnacs. Pour ce qui est du rhum, l’offre de produits est plutôt mince, pour ne pas dire rachitique, et il reste très difficile de connaître avec exactitude leur méthode de production.

Il s’agit principalement de produit estampillés Commerce Équitable, en provenance du Brésil, d’Haïti ou encore du Paraguay ; ils portent des noms exotiques comme Papagayo ou encore Cabana Libre, et ils ont tous en commun d’être principalement destinés à la mixologie (surtout blanc, parfois ambré). Le plus sérieux candidat serait assurément la marque FAIR qui propose actuellement 3 rhums à son catalogue (deux du Bélize et un de Jamaïque, aux côtés d’autres produits comme de la vodka, du gin, et des liqueurs) ; ils ont pour particularité d’allier le commerce équitable et le développement durable, utilisant une canne à sucre cultivée selon des méthodes d’agriculture biologique, mais sans certification officielle.

 

Vers un avenir BIO et RHUMantique

Depuis quelques semaines est arrivé le rhum MANA’O, un rhum agricole bio qui nous vient directement de Polynésie française (Tahiti) ; fabriqué à partir de canne à sucre indigène (nommée O’Tahiti), le vesou fraichement pressé est fermenté sur place à l’aide de levure biologique, avant d’être distillé à Papeete via un alambic discontinu (pour un distillat qui sortira à 89%).

C’est à notre connaissance la seule marque, avec la distillerie Neisson en Martinique, à s’être réellement et intégralement investie dans cette démarche d’agriculture Biologique, en suivant les longues années qui mènent à la certification, et en respectant scrupuleusement un cahier des charges qui aurait de quoi en décourager plus d’un. Et alors que leur rhum blanc commence tout juste à être distribué, une partie de la production est déjà en vieillissement.

 

Du BIO dans les DOM

Pourquoi la Martinique, la Réunion, la Guadeloupe ou la Guyane ne produisent pas de canne BIO ? Le secteur semble pourtant plutôt porteur, de marché si ce n’est de valeur.

Nous verrons dans les quelques questions posées à Grégory Vernant-Neisson ci-dessous, que le climat des Antilles, la culture de la canne, et les différents coûts qu’elle implique, ne sont pas à l’origine propices à ce genre d’aventure.

C’est pourtant avec sa distillerie, la plus petite de la Martinique, qu’il a décidé de se lancer dans l’aventure du bio, pour cette année peut être décrocher la fameuse certification. Un pas de plus vers une agriculture raisonnée déjà chère à Neisson, qui pousse un peu plus loin les limites de l’authenticité. Et qui d’autre que Neisson aurait pu tenter ce pari..?

 

Grégory, depuis quand avez-vous commencé cette démarche de passer en bio ?

Il y 5 ans, et nous sommes actuellement en conversion 3, c’est à dire l’étape finale en quelque sorte.
(note : cette période de conversion permet d’enclencher les changements des cycles de vie des animaux, des plantes et des organismes qui vivent sur et dans le sol. La conversion des terres agricoles sert aussi à épurer les sols d’éventuels anciens résidus chimiques)

Cela concerne-t’il uniquement la canne ou ça va au-delà (process de fabrication du rhum,..) ? Et quelles sont les contraintes majeures ?

Le cahier des charges ne concerne que la canne ; c’est la même chose que pour le vin bio.

La contrainte se situe plus au niveau variétal de la canne ; Ecocert impose d’utiliser une autre variété de canne pour qu’il n’y ait pas de doublon dans ma production. Pour comparer avec le vin, en Bourgogne il n’y a qu’un seul cépage (le pinot) par exemple. Il y a des cannes qui s’adaptent mieux que d’autres, et je crois personnellement plus au terroir qu’aux variétés de cannes.

Bénéficiez-vous de certaines aides, au niveau local ou au-delà ?

Il faut savoir que depuis la fin des années 80, il n’y a plus de spécialiste en culture tropicale. Aujourd’hui on travaille beaucoup avec des gens de Colombie ou de Saint-Domingue, qui ont cette approche bio depuis 20 ou 30 ans. Je fais partie d’un petit groupement de producteurs, et on se met entre nous pour faire venir un ingénieur de Saint-Domingue justement, 1 fois tous les deux mois, mais on se pose beaucoup de questions, car nous ne sommes pas dans un climat propice au bio. Et je suis seul à cultiver la canne dans le groupe.

Chez nous, on produit des produits exotiques à un coût européen ; pour donner un exemple, un coupeur de canne chez moi est payé 38€ la tonne, là où il est payé 1 dollar à Haiti…

Et il ne faut pas oublier qu’en métropole les agriculteurs ont un désherbant super efficace qui s’appelle l’hiver, où pendant 6 mois rien ne pousse. Ici tout est différent, il faut s’adapter.

Diriez-vous que faire du bio en Martinique est difficile ?

Il est facile de faire du bio sur deux hectares, le problème c’est de le faire à une échelle « normale ». Je suis allé au Brésil pour voir une exploitation bio de 1000 hectares, et une chose est sûre c’est qu’ils font vraiment du bio là-bas ; tout comme les USA, ils ne plaisantent pas avec les normes et il n’y a pas de juste milieu.

A l’époque, mon grand-père faisait déjà de la culture inter-rang, et j’étais trop jeune pour voir toute l’utilité de la chose ; aujourd’hui, on cherche à remettre au goût du jour des recettes qui ont 30 ans ou 40 ans…

Un champ classique chez nous correspond à peu près à 40 heures d’intervention humaine à l’hectare, en bio on s’est retrouvé la première années à 600 heures…les débuts ont forcément été hésitants.

Quelle superficie cela représente-t’il chez vous ?

Cette année on va arriver à pas loin de 4 hectares, et on essaye d’augmenter d’un demi à un hectare par an. Le bio est la seule agriculture où il n’y a pas de subventions chez nous (il y a tout au plus une ‘aide’ de 400€ par hectare), donc on essaye de faire les choses correctement tout en continuant à produire suffisamment à coté.

Et pourquoi être parti dans cette aventure qui semble plus semer d’embûches qu’autre chose ? Quelle est votre démarche ?

En fait, j’ai une approche qui n’est pas du tout intégriste, et si jamais ça ne marche pas, alors je reviendrai à une agriculture raisonnée. Je crois aussi en l’avenir des désherbants bios, mais le problème ici, c’est que même si la canne est une culture majeure sur le plan mondial, sur le plan européen c’est une culture mineure ; il n’y en a qu’aux Antilles et un peu à Madère, et les labos ne veulent plus faire de recherches, car cela coûte trop cher aujourd’hui pour homologuer les produits. On préférera malheureusement donner des dérogations pour des produits qui ne sont plus agréés (NDLR: l’Asulox par exemple) que mettre l’argent sur autre chose de plus naturel. Le combat est inégal.

C’est vraiment une démarche personnelle ; je pense qu’il y a un moment, quand on nous emmène des bidons avec des têtes de mort et qu’on nous dit que ce n’est pas dangereux, on doit se poser des questions.

Pensez-vous que ça donnera des idées à vos ‘concurrents’ ?

Aujourd’hui je ne sais pas, j’aimerais bien que d’autres s’y mettent également ; il y a 20 ans on faisait rire tout le monde quand on parlait de terroir ; aujourd’hui tout le monde en parle.

Que faites-vous du rhum actuellement produit sur ces parcelles ?

Pour l’instant les rhums sont mis à part ; cette année par exemple, j’en ai eu très peu, je dois avoir dans les 3000 litres de blanc ; je vais voir en fonction du contrôle si j’ai le droit de mettre que le rhum est issu de canne en conversion bio.

Et j’en ai mis une partie en vieillissement aussi, mais bon, pour être franc ça n’a pas été fait pour faire un truc commercial pour l’instant, parce que sinon je crois que j’aurais arrêté.

Avez-vous pu déjà noter des différences ? Au niveau culture et produit fini ?

Certains rhums ont changé en profil, mais on n’arrive pas à savoir pour le moment si c’est dû à la levure (ndlr : Neisson a utilisé les souches des parcelles bio) ou la canne bio.

On a embauché pendant 6 mois un docteur en écologie des sols, et on peut déjà dire qu’il y a une réelle transformation de la vie animale, qui n’a rien à voir avec avant. J’ai un retour incroyable de papillons, que je n’avais plus. Même les herbes sont différentes, c’est impressionnant. Après je pense que c’est à nous de développer le désherbage mécanique et de mettre au point des machines.

On vous reproche souvent des prix élevés, qu’avez-vous à répondre à ça?

Pour prendre un exemple, on me dit parfois que mon 18 ans est cher, mais il faut savoir qu’on en a récupéré qu’une barrique sur tout ce qui a été mis a vieillir… C’est comme pour le 21 ans qui vient de sortir : il restait 3 fûts et sur les 3 barriques on a récupéré environ 200 litres, j’en ai perdu 20 ou 30 à la filtration. On revient au principe du bio , il y a des moments où il faut savoir s’arrêter… 21 ans c’est déjà pas mal, après, pour nos climats c’est compliqué. C’est peut- être faisable, mais moi je ne sais pas faire.

C’est simple cette année j’ai fait 1,8% de la production de l’île, et pour faire simple j’ai plus de gens en agriculture chez moi, que d’autres qui produisent pas loin de 10 fois ma production, alors effectivement ça a un coût…

 



D’ici quelques décennies, nous repenserons peut-être à ces débuts fébriles, avec un sourire nostalgique accroché aux lèvres… un sourire qui sera moqué par nos enfants avec raison et bienveillance, décriant le manque d’empressement collectif de leurs paternels. Éternel recommencement intergénérationnel… où on pense, peut-être à tort, que c’était mieux avant, alors que l’avenir ne reste ni plus, ni moins, que du passé en préparation, du passé en voie de labellisation. Comme s’il fallait marquer dans le marbre bureaucratique les principes de nos ancêtres, sûrement par risque d’amnésie… Triste mais nécessaire constat, pour retrouver la raison et la transmettre aux générations futures.

Où le présent accouche de l’avenir avec douleur, mais espoir…

Et alors que certains s’essoufflent à premiumiser le rhum à coup d’artifices et de lobotomies savamment orchestrées, nous devrions tous nous interroger sur l’étrangeté de vouloir systématiquement défendre nos erreurs, plutôt que nos valeurs.

 

Comments
17 Responses to “Le BIO en Questions”
  1. Jerry Gitany dit :

    Très bel article . Petite précision néanmoins, le plus souvent ce sont les champs de cannes qui ont été transformés en champs de bananes dans les années 60( car subventionnés par l’Europe) pour l’avoir vécu sur les plantations Saint-James de Trou Vaillant à Saint-Pierre ou mon grand-père était gérant de la distillerie et où je suis née .

    • cyril dit :

      Salut Jerry,
      Merci pour les précisions, ça a du arriver plus souvent dans ce sens là c’est certain 🙂
      malheureusement pour l’environnement d’ailleurs, dans un cas comme l’autre :/

  2. Guillaume gr dit :

    Dans l’itw de Mr Vernant Neisson, il faut lire Pinot Noir le cépage et non Pineau l’apéritif charentais.

  3. Nico dit :

    Merci c’est un excellent article et un sujet trop peu souvent abordé. Neisson montrera sans doute que ces efforts sont viables à long terme et fera, espérons le, des émules.
    Je crois qu’il faut également faire attention à l’environnement de la distillerie elle-même car les produits utilisés, notamment pour nettoyer le matériel et les cuves par exemple, peuvent être très violents.

    • cyril dit :

      Merci Nico
      L’environnement est un vaste sujet… Et en effet pas sûr qu’ils nettoient avec du vinaigre blanc et du citron 😉
      Et rien n’empêche d’utiliser des nettoyants néfastes y compris dans l’agriculture biologique, après c’est une question de bon sens…

  4. matpib dit :

    bien joué pour l’article !

    tu ne parles pas des Clairins (Casimir, Vaval et Sajous) distribués par Velier. Est-ce fait exprès ?
    on a pourtant une agriculture locale, des levures indigènes, sans aucun intrant.

  5. Jean-Louis DONNADIEU dit :

    Bel article, qui pose des questions fondamentales,sur un sujet trop peu abordé. Merci Cyril d’être ainsi en éveil, et espérons que la prise de conscience du respect de l’environnement, du terroir, des plants… ira croissante. A suivre !

    • cyril dit :

      c’est tout le mal que l’on peut souhaiter à l’avenir, aux générations futures…
      Merci Jean-Louis

      • Jean-Louis DONNADIEU dit :

        La question se pose pour l’ensemble des cultures : soit c’est le productivisme à outrance (donc de gros dégâts pour l’environnement), soit -et de plus en plus- l’agriculture raisonnée, c’est-à-dire qu’on met le minimum d’intrants, soit (en finalité) le bio. J’ai vu dans mon entourage des familles d’agriculteurs -vigne et céréales- faisant depuis longtemps de l’agriculture raisonnée (qui acceptent donc déjà des contraintes importantes), et je sais qu’il n’est pas évident de passer au bio, car il faut avoir les reins solides pour accepter une nouvelle perte de volumes de production et donc de rentrées financières, d’où de la prudence, des essais sur certaines parcelles et pas sur la totalité de la surface… Ma (petite) connaissance de la Guadeloupe et de la Martinique me conduit à penser qu’il y a des rhumiers très sensibles à cette question, qui de fait pratiquent une agriculture raisonnée (les normes AOC ou IG tendent vers cela, me semble-t-il). Pas facile cependant de franchir la nouvelle marche. Le débat est lancé, c’est bien d’en parler, merci Cyril.

        • cyril dit :

          En effet cela semble être un chemin semé d’embuches pour le bio, et cela renforce le respect que nous devons à ceux qui osent ce pari risqué ; c’est un sacerdoce qui n’a que peu d’intérêts économiques pour de si petites productions… Mais si tout le monde pouvait pratiquer une agriculture raisonnée, alors ce serait déjà beaucoup.

  6. mily dit :

    l’agriculture bio est un mythe aux antilles y compris la Martinique étant donné que les sols, lair et l’eau sont pollués à cause du chlordécone. Il en faudrait des siecles pour que la terre

    http://www.ldh-france.org/chlordecone-en-guadeloupe-pollutioncontamination-globale-lenvironnement-population/

    http://www.naturavox.fr/sante/Bananes-pesticides-et-cancers-sous-le-soleil-des-Antilles

    • cyril dit :

      Bonsoir Mily

      Le chlordecone est une belle saloperie, et il y a effectivement beaucoup de plantations de cannes sur d’anciennes bananeraies (mais bien heureusement pas partout). Il ne passe par contre pas le stade de la distillation dans l’élaboration du rhum (plus particulièrement grâce au haut degré), donc pas de trace dans le produit fini. N’empêche que les sols sont eux contaminés, et pas qu’un peu, et pour très longtemps.

      le passage en agriculture bio n’est pas un mince affaire mais Neisson a montré que cela était possible, avec résultats à l’appui (organismes vivants très présent dans le sol, retour de nombreux insectes, papillons, etc..) et certification (Ecocert/AB). C’est un signe plutôt positif de changement, mais tout le monde n’est bien sur pas logé à la même enseigne selon sa situation géographique et le passif de son sol (anciennes plantations demandant l’usage du chlordecone,..etc).

  7. Jhon dit :

    Bonjour,
    Vous prenez en exemple le Rhum Mana’o en nous disant qu’il est « BIO » mais qu’elle certitudes avons nous ? (Quand on sait que le permis voiture s’obtenait il y a 5 ans en arrière avec une caisse de bière ou de langouste)
    Il y a t’il des contrôles au niveau des champs régulièrement ?
    Qu’est ce qui nous garantie que les champs ne sont pas remplis de Gramoxone ?

    Mettre le « Bio » en avant peut être intéressant a conditions que ce ne soit pas du BIO-BUSINESS.
    De plus en plus de producteurs refusent d’adhérer au label « BIO », car pour eux ce dernier ne représente plus un gage de qualité depuis 2008. Pourtant ces producteurs pourraient être certifiés car il n’utilisent absolument aucun engrais chimique, au pesticide et font même de la culture extensive qui préserve les sols.
    Que pensait vous de ses derniers qui vont à l’encontre du système?

    • cyril dit :

      Bonsoir Jhon
      Pour le cas de Mana’o, il y a bien sur eu une certification officielle, et assez rapide dans le sens où les terres étaient vierges de toute culture depuis des décennies, en plus d’une absence de pollution environnante (pas d’activité humaine polluante autour). Je ne connais pas le nombre des contrôles ni leur périodicité désolé. Entièrement d’accord sur le Bio Business, mais nous en sommes assez loin ici vu la faible production. il y a néanmoins des rhums certifiés Bio (brésiliens par exemple) qui ne sont rien d’autre que l’éthanol bio aromatisé fabriqué à une échelle industrielle.

      Et nulle doute que d’ici quelques années (décennies?) les producteurs les plus sérieux se pencheront vers d’autres labels au cahier plus drastique et respectueux, comme nous le voyons déjà dans l’alimentaire ou les produits cosmétiques

  8. Louis Chapat dit :

    Article génial !!! merci de m’avoir éclairé la dessus, je cherche à me procurer du Rhum bio en grande quantité malgré les prix élevé. tu a répondu à plein de question que je me posais ! merci 🙂

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