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Distillerie Savanna | High Esters Rum Réunion
Dernièrement nous nous sommes attardé sur le nouveau Lontan (Grand Arôme) 12 ans de chez Savanna. Peu de temps avant cette sortie officielle, LMDW sortait pour ses 60 ans un autre Grand Arôme de chez Savanna du doux nom de HERR : un rhum que l’on pourrait juger similaire, mais qui est au final bien différent du Lontan…
Créé à l’origine pour cibler le marché allemand et son goût prononcé pour les rhums Jamaïcains (que l’on peut considérer à juste titre comme des grands arômes), il est directement inspiré de ce que réalisent les jamaïcains en matière de rhums « High Esters » ; une déclinaison donc plus fruité et plus aromatique que le Lontan. Considéré trop coûteux et trop différent des standards, le rhum finira en partie chez un embouteilleur indépendant japonais, ainsi que chez LMDW (pour un total de 2 fûts). Il resterait de cette production très marginale un petit stock de vieux et de blanc à Savanna, peut-être de quoi leur donner des idées, qui sait ?
HERR | côté production
La base de la fermentation a beau être la même que le Lontan, le HERR bénéficie d’un travail bactérien différent et supplémentaire qui se veut plus proche des caractéristiques d’un rhum Jamaïcain, avec une plus grande richesse aromatique que le Lontan, notamment en esters (plus riche qualitativement et quantitativement). Et alors que le Lontan est distillé via la colonne traditionnelle Savalle de Savanna, le HERR est lui distillé (préférentiellement) de manière discontinue via un alambic classique (et non à repasse), une première à la distillerie, permettant une extraction maximale (absence de colonne) des arômes fermentaires ainsi qu’un temps de séjour du vin plus long à de hautes températures favorisant les réactions chimiques à l’origine d’une flaveur atypique. Le vieillissement du rhum s’effectue en ex-fût de Cognac comme la plupart des productions de la distillerie.
Savanna 10 ans HERR / 63,8°
High Ester Rum Réunion, où dit autrement un rhum jamaïcain à la réunionnaise. D’abord élaboré pour le marché allemand friand de jamaïcain (notamment pour leur Vernischtt), il tombera dans la besace de LMDW avec un prix qui s’en ressortira fatalement. 685 bouteilles de 50cl verront le jour.
Ce rhum avait créé la surprise lors du dernier Whisky Live, notamment par son caractère très particulier, le cataloguant d’ovni et déconcentrant de nombreux visiteurs. On vous invite chaleureusement à lire les différents retours sur les différentes pages des réseaux sociaux et sur l’excellent site Whisky Leaks.
La robe est d’une éclatante couleur ambrée tirant sur un vieil or des plus apaisants. Huileuse et nonchalante, le temps semble s’être arrêté sur des larmes bulbeuses, cadenassées sur le verre.
Au nez c’est la surprise qui prime et qui questionne, et ce rhum ne laissera personne (et c’est peu dire) indifférent: une odeur âcre et acidulée rappelant successivement un bonbon gélifié et des tranches d’ananas fraîchement tranchées avec un exotisme foisonnant et acidulé, puissamment frais et excentrique (bonbon arlequin, stick huhu) et qui semble déjà assiéger nos parois nasales, d’une puissance généreuse et éclatante. Il y a dans ce rhum une profusion d’ananas, puis de la banane, de la fraise séchée, des tanins veloutés et des épices si douces que le degré alcoolique semble surfait. Ce nez est aussi atypique et extravagant qu’il est complexe, aussi dérangeant qu’il est séduisant et curieux. Et il n’a en effet que très peu en commun avec le Lontan, beaucoup plus sombre et empyreumatique, sage et contrôlé, même si tous deux jouissent d’une richesse exceptionnelle. Ce HERR tout en gardant son exotisme marqué et irréversible semble avec le repos laisser apparaitre une ambiance fumée et comme embaumée (engluée) ; on y resterait sans doute des heures avec la même curiosité, vous scotché au verre et abasourdi, lui débordant et verveux.
En bouche, l’attaque est littéralement acide et saumâtre, fumée (ou braisée?), très médicinale et d’une richesse ébouriffante ; elle ne semble pas vouloir s’amoindrir, mais mieux, conquérir un peu plus le palais, enfonçant les portes une à une et laissant derrière elle des trainées de notes souveraines et énergiques (mais subtiles), pilonnant son hôte avec délicatesse et bon goût, avec dextérité et tendresse.
Vous ne pensiez pas pouvoir être brutalisé avec affection? avec sympathie et bienveillance? que l’on vous embrasse avec la bouche tout entière? et bien détrompez-vous, ce rhum est monstrueusement docile et saura vous prendre tout entier, vous caresser les sens tout en laissant l’empreinte de ses ongles acérés. Un rhum qui rendrait transpirant le plus aride des sols. Vous vouliez de l’animalité dans votre rapport buccal avec le rhum? Les fruits exotiques semblent encore un peu plus porter la dégustation, expulsant leur opulence sans aucune gêne et avec un désir relâché, sucré et acide, s’ébattant en vase clos et délivrant des charges électrisantes de notes saccharines, coquettes et caustiques, mordantes, dans une finale qui n’aura jamais aussi bien porté son nom.
Un rhum qui ne ressemble à aucun autre, ou peut-être à ces jamaïcains hyper-concentrés mais ici bien plus excessif dans l’exotisme ; car si vous n’appréciez pas ces notes d’artichaut et d’olive présentes dans les rhums à longue fermentation, ce rhum serait sans doute à essayer : l’exotisme apporte une sorte de facilité malgré le degré, et un côté charnel et électrisant. Note: 86
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Salut cyril 😉
A acheter, je ne sais pas, mais à tester sûrement, car forcément intéressant…
Je ne le dis pas à chacun de tes articles, mais merci pour toutes ces découvertes, y compris lorsqu’il s’agit de mauvais produits (je ne dis pas cela pr le Savanna !, mais ils se reconnaitront 😉 ), car tout cela demande du boulot (je parle de l’étape de la rédaction, pas celle de la dégustation… 😉
@+
Salut Cyril, merci pour la lecture ; ça reste du plaisir et du partage