Rhums La Mauny

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Non ce soir, on ne se tape pas que des ti’vieux, soyez-en rassurés, car il sera question (aussi) d’ambrés et même de millésimés. Rien de bien jeune vous me direz, mais rien de trop usé non plus, et juste du rhum (quoique). Côté La Mauny, nous avons déjà goûté la Cuvée Nouveau Monde, un assemblage sans âge (bienvenue dans le monde merveilleux du NAS / No Age Satement), ainsi que le Millésime 1979, un rhum vieux et donc à minima de 3 ans d’âge.

Nous nous intéresserons ici à 3 ambrés, une curiosité, la gamme classique (VO, VSOP, XO), un vieux 7 ans, et enfin un millésime 98. Et puisque le vieux n’est pas la panacée, nous ajouterons deux rhums blancs d’un autre temps. Avant ça, on sort les lunettes et la pipe pour un petit rafraichissement historique.

 


 

 

La Mauny | la story

Le nom La Mauny a pour origine celui d’un comte, Joseph Ferdinand Poulain (compte de Mauny), né en Normandie et qui débarqua à la Martinique en…1749 (année souvent reprise sur les embouteillages). Si l’habitation La Mauny fut très longtemps une sucrerie (où l’on fabriquait également un peu de guildive/tafia), elle changera plusieurs fois de propriétaire, notamment en 1883 où la propriété fut achetée -dit-on- à prix d’or par  la famille Codé. Et c’est seulement en 1890 qu’est construite une distillerie moderne (pour l’époque) et que commence vraiment la production de rhum (comme activité principale) avec la famille Lapiquonne. Puis, en 1923, l’affaire est revendue aux frères Théodore et Georges Bellonie qui décident de moderniser la distillerie et la plantation (et remplacent le vieux pot still par une première colonne créole) et font connaitre le rhum La Mauny sur le marché martiniquais.

La production s’accroit et la distillerie restera en fonction jusqu’en 1970. Les successeurs et membres de la famille Bellonie décident ensuite de s’associer à la maison Bourdillon originaire de Marseille: la société devient alors « les Anciens Établissements Bellonie, Bourdillon successeurs, La Mauny » (une mention portée sur les étiquettes de l’époque et qui permet de dater d’anciens embouteillages). A partir de cette union, Jean Pierre Bourdillon entreprend de moderniser la distillerie et l’entreprise prend une nouvelle impulsion. C’est aussi à son initiative que démarrent les longues démarches qui mèneront bien plus tard (1996) à la création de l’AOC Martinique.

Auto-suffisantes en canne jusqu’en 1963, les plantations de l’habitation ne suffisent plus et ils font alors appel aux planteurs du voisinage. L’affaire prit même une telle envergure qu’il fallut, en 1983, adjoindre une nouvelle distillerie plus performante. Le rhum alors écoulé à la Martinique titre 62°, 55° et 50° pour le blanc, et 45° lorsqu’il est vieux (âgés de 3, 5 et 7 ans). Ce dernier, alors peu vendu, est stocké pendant 7 à 8 ans dans 1 500 fûts américains, d’une contenance de 200 litres chacun. Début des années 80, une nouvelle distillerie fut donc installée avec 3 colonnes à distiller (dont 2 colonnes de l’ancienne infrastructure).

Le dynamisme de la société se traduira également par la prise de contrôle des rhums Duquesne et Trois-Rivières (cédés par Martini et Rossi en 1994). La distillerie Trois-Rivières qui fermera en 2003 et dont les colonnes seont transférées à Rivière-Pilote. Acheté par Quartier Français en 2007, le groupe BBS est ensuite racheté en 2011 par La Martiniquaise, qui la cède à son tour, en 2012, au groupe Chevrillon.

La Mauny | côté production

Quelques dates clés…
– En 1929 modernisation et installation d’une colonne créole en lieu et place d’un pot still (système de type « Père Labat »)

– En 1984 construction de la nouvelle distillerie dotée de 3 colonnes, dont 2 issues de l’ancienne infrastructure.

Aujourd’hui, la fermentation (faite à partir de levures saccharomyces cerevisiae sélectionnées en distillerie) s’effectue dans 3 cuves mères qui servent à inséminer 24 cuves de 45 000 litres et dure 24 heures. Le vin obtenu est le même pour les trois marques (La Mauny, Duquesne, Trois Rivières) produites sur place ; c’est la distillation (distincte selon la marque) qui fera une différence :  La Mauny est distillé dans deux colonnes Maresté, construites en 1984 et 1996, et dans une colonne plus moderne Interunion à 26 plateaux datant de 2004 et capable de produire 1000 litres/heure, soit le double des colonnes Maresté. Le rhum distillé titre 70° à 300g/hl d’éléments non-alcools. Le rhum est mis en vieillissement chez La Mauny en fût de chêne français (et en fûts de Bourbon pour Trois Rivières).

 

 


 

 

La Mauny blanc Supérieur / 50°

Un blanc vraisemblablement des années 60/70 titrant 50%, et donc un blanc distillé dans l’ancienne distillerie d’avant 1984? plus que probable ; à partir d’une autre colonne? possible aussi.

Robe limpide et plutôt grasse, couronne de gouttelettes dessinant de belles jambes dodues.
Au nez, c’est très frais et végétal, sur une canne gonflée et anisée, entre douceur sucrée et fraîcheur alizée. Le rhum devient floral et avec le repos prend un peu de poids, de lourdeur sur le végétal, et d’épices (poivre blanc). L’alcool est bien intégré et le nez agréable même si quelque peu fermé.

L’attaque est mielleuse et incisive, intense sur un végétal toujours aussi frais et maintenant épicé, poivré et légèrement pimenté. L’anis explose en bouche et se répond partout en bouche renforçant l’impression de fraîcheur, lui donnant des élans mentholés mais toujours dans une ambiance sucrée. Le poivre et les épices structurent la bouche qui semble sans fin (sur l’anis, la réglisse fraîche), conquérante.

Les 50° servent l’ensemble à merveille, donnant à ce blanc une présence conquérante, anisée et poivrée du plus bel effet. Note: 83

 


 

 

La Mauny Blanc Supérieur / 50°

Le même mais des années 70/80 toujours à 50%, toujours avec les mêmes probabilités (si quelqu’un d’instruit passe par là, qu’il se manifeste).

Robe cristalline, huileuse et jambes tout aussi gourmandes que le blanc précédent.
Au nez, on est sur un rhum blanc beaucoup plus fruité, rond et gourmand : on a de la banane et du litchi qui soutiennent une canne opulente et mature, remplie de sucre.

La bouche est concentrée, huileuse et très bien équilibrée : se mélangent des notes de fruits exotiques, d’anis et de canne, dans un ensemble fondu relevé par des épices poivrées qui semblent tout mettre en valeur. Une sucrosité sert l’ensemble, presque résineuse dans un blanc presque à mâcher. La fin de bouche est très longue et savoureuse, équilibrée et même complexe.

Superbe blanc, très bien équilibré et savamment concentré. Un rhum de bouche par excellence. Note: 86

 


 

Direction les rhums ambrés maintenant…

Et il y en a pas mal chez La Mauny, avec d’abord le ‘La Mauny 1749’ : présenté sous la forme d’une ancienne bouteille, il s’agit d’un ambré classique (anciennement appelé rhum doré) ; ensuite nous trouvons un ‘Maison La Mauny Ambré’, qui se trouve être en quelque sorte la continuité du 1749 mais après un remaniement de la marque (La Mauny devient Maison La Mauny) et un nouveau contenant ; et enfin, un ‘Maison La Mauny 1749 Héritage’ qui est toujours un ambré, qui reprend la date du premier produit, mais qui est cette fois fini en fût de Porto (et oui, on fait même des finish sur les rhums ambrés, ce monde est plein de surprises…). De quoi se perdre avec ces 1749 un peu partout, mais passons vite à la dégustation voulez-vous.

 

La Mauny 1749 ambré / 40°

Rhum ambré « 1749 » à ne pas confondre avec le « 1749 Héritage » que nous verrons plus bas et sorti beaucoup plus tard.

 

Robe dorée et huileuse aux larges jambes, plutôt imposant pour un rhum ambré.
Au nez, le rhum apparait doux et sucré, rond et dominé par des épices chaudes: gingembre, cannelle, suivi d’un boisé fin et sec. Des notes de sucres dominent, de fruits secs (ananas séchés), et d’orange. C’est simple, chaud et sucré avec un peu de fraîcheur (zeste). Plutôt agréable pour un rhum ambré, ennuyeux mais pas trop. On sort du blanc si interessant avant de rentrer dans le vif du sujet, un entre deux sans grosse complexité apparente mais qui fait le travail.

En bouche, l’attaque est douce, sur un mélange de chêne (boisé mouillé), d’épices et de sucre (caramel), de vanille et de fruits séchés exotiques (zeste agrume). Ça évolue sur le bois et les épices qui se font maintenant poivrées ; plus le rhum reste en bouche et plus il joue des épices, mais toujours en harmonie. La fin de bouche est moyenne sur la jeunesse du bois, franc, incisif, toujours entre deux et sur le fruité. Sec en toute fin de bouche sur des notes d’alcool.

Un rhum qui montrera rapidement ses limites en dégustation pure, mais là n’est à priori pas son but initial. Note: 76

 

 


 

 

Maison La Mauny ambré / 40°

Le ‘même’ que plus haut mais avec un nouveau nom, et une nouvelle bouteille. Il perd l’année 1749, mais le retrouvera plus bas lorsqu’il sera question d’ ‘héritage’.

La robe est ambrée, brillante et huileuse ; les jambes sont toujours larges et l’impression de gras plus présente que le précédent rhum.
Au nez, le rhum apparait nettement plus sucré (sucre cuit), lourd et comme gras, avec beaucoup de fruit sec (raisin, prune), de pâte de coing, et de muscade pour les épices. L’atmosphère semble beaucoup plus pesante et chargée en sucre (pâtes de fruit) et en douceur pour un ambré 2.0 qui semble vouloir flatter avant tout, plus gourmand et vanillé, caramélisé.

La bouche est aussi bien différente, plus grasse, mielleuse et sucrée. C’est vraiment très doux, sur des fruits secs caramélisés et vanillés, un boisé fin noyé dans le sucre, des épices qui apportent une légère tenue et deviennent poivrées (pointe de piment). La fin de bouche est plutôt courte, sèche, mixant notes amères et sucrées.

Un ambré nettement plus rond et souple, qui semble moins authentique que le premier (et plus fade), plus surfait et moins bien travaillé (et complexe). Note 73

 

 


 

 

Maison La Mauny Héritage 1749 / 40°

Toujours un ambré, mais cette fois avec un finish Porto (plus précisément un ambré « transféré plusieurs mois dans des foudres de chêne ayant servi à l’élevage de vin de Porto Ruby »). Pourquoi parler d’Héritage quand le rhum n’est plus que ‘juste’ ambré, mystère. Pourquoi faire un finish sur un rhum de 18 mois ? mystère bis.

La robe est ambré soutenue, avec de légers reflets cuivrés. Grasses, les jambes collent aux parois.
Au nez, de la rondeur et de la confiture, de la pâte de fruit et du sucre cristallisé. On retrouve des fruits noirs, du pruneau en tête, des fruits secs et du caramel ; c’est nettement moins vanillé et boisé qu’un simple ambré, la finition gommant les aspect rugueux contre des notes plus confiturées et collantes, lui retirant pas mal de parenté avec le rhum. On connait déjà les effets dévastateurs des finish sur des rhums plus vieux, La Mauny (La Maison La Mauny pardon) nous montre que c’est encore pire sur un ambré.

En bouche, c’est onctueux, gras et sucré. Boisé, caramélisé et sucré, avec pas mal de fruits séchés, de miel, de confiture, d’épices, de la pâte de fruits ; c’est doux, suave et très facile, mais ça manque de peps, de rhum, pour un fin de bouche moyenne, toujours sucrée et desséchante, épicée, mais avec une pointe de fraîcheur intéressante.

Un ambré du troisième type, qui avec ce passage en foudre de Porto se retrouve forcément marqué avec des notes de fruits cuits ; loin d’être désagréable au final, et sûrement un intermédiaire aux ron sucrés, mais plus très rhum ni ambré au final. Déjà que le rhum ne passe que 18 mois, alors avec un finish… Si vous aimez les finish, autant prendre un rhum qui aura eu le temps d’en devenir un (c’est à dire avec plus de 18 mois de vieillissement). Note: 75

 


 

Maison La Mauny Signature / 40°

Un rhum vieux (donc à minima âgé de 3 ans) sorti tout droit de la tête du maître de chais. On sait simplement (vous allez me dire c’est déjà ça, même si on aimerait en savoir plus) que c’est un assemblage de rhums vieillis dans 4 types de fûts différents: des finitions en fûts de Porto et Moscatel et un vieillissement en fût de Bourbon et Cognac. Encore une expérimentation qui pousse les frontières du rhum.

Robe ambré, plutôt grasse, à la manière du ambré Héritage 1749 (vous suivez?).
Au nez, c’est un peu une redite, dans le sens où on s’éloigne du rhum pour un nez un peu foutraque, qui reprend sûrement les différents ‘affinages’ mais qui aura tendance à perdre l’amateur averti. Une expérience ? sûrement ; une réussite ? peut-être pas. On est dans un mix de notes de raisins, de fruits rouges et noirs, tantôt sucrées tantôt caramélisées, et toujours vanillées. Rien qui ne se mélange harmonieusement, mais c’est une expérience, éventuellement. Il y a pas mal de fruits, et de différentes familles, du verger et du soleil, déconcertant. Le Maître de chais s’est sûrement fait plaisir, mais en tant qu’amateur de rhum je préférerais du rhum. Je ne suis pas la bonne cible, assurément. La note officielle (oui, j’ai fais mon curieux) parle de « complexité » au nez.

En bouche, c’est riche, plutôt gras, et pour rependre la note officielle « singulier » et « original » avec des fruits dans tout leur stade de développement : du petit fruit sec au gros compoté en passant par celui à l’eau de vie et le macéré depuis trop longtemps. Bref, on s’éloigne encore un peu plus du rhum, mais pourquoi faire au final ? noyer un produit de base déficient ou vraiment chercher la différence ? c’est à se demander. On a tantôt l’impression d’avoir du vin blanc en bouche, peut être même du porto et je ne sais quoi d’autre. Au moins la bouche est concentrée, riche et plutôt agréable. La fin de bouche est longue et tout aussi « singulière » et « originale ».

Un peu circonspect sur cette dégustation. En tant qu’amateur de rhum, et peu habitué aux autres alcools, je ne sais honnêtement pas où situer ce produit. Il se détache complétement des standards, à se perdre dans bien trop de choses, sans se concentrer sur une base « solide » et une identité certaine. Ça reste agréable, mais bien trop compliqué. Note: aucune idée, j’ai l’habitude de noter des rhums, pas autre chose (désolé).

 

 


 

 

La Mauny VO / 40°

Un rhum vieux de 3 ans d’âge, embouteillé à un classique 40°, et toujours sous la forme d’un ancien embouteillage .

 

Robe d’un bel ambré brillant aux reflets dorés, huileuse et gourmande.
Au nez, on sort des notes légères du ambré pour plus de tenue, de notes boisées et poivrées, mais  tout en gardant une ambiance chaleureuse de sucre cuit. Quelques notes exotiques se frayent un passage, mais la dominante est et restera boisée et épicée.

En bouche, l’attaque est douce et chaleureuse, sur un boisé épicé et vanillé, du fruit cuit et quelques notes de caramel ; le côté végétal du rhum est encore bien présent (herbe) et apporte une belle structure à l’ensemble. Les fruits cuits et les épices se mélangent harmonieusement, vers une fin de bouche assez longue, sur un boisé vanillé et des épices légèrement poivrées qui persistent.

 

Après le rhum ambré 1749 (même style de bouteille que ce VO), on note une belle évolution avec le vieillissement, plus de complexité et de structure ; une bonne nouvelle pour la suite et pour le VSOP. Note : 82

 

 


 

 

La Mauny VSOP / 40°

On rentre dans le vif du sujet, un assemblage de rhums de 4 à 10 ans, déjà plus évolué, et sans finish.

 

Robe ambrée/cuivrée huileuse aux -très- épaisses jambes.
Au nez, c’est très exotique et plutôt frais, sur l’ananas en tranche, la cannelle et un caramel avancé ; très expressif (surtout comparé aux ambrés). On est toujours dans cette ambiance ronde et un peu crémeuse même, pâtissière. Une note métallique tranche, mais le fruit exotique sucré domine, dans une ambiance fraîche et agréable, et même sombre avec le repos. Simple et joli, très bien exécuté.

En bouche, l’attaque est douce, chaude et concentrée ; elle mélange très habilement exotisme sucré/caramélisé, épices et notes phénoliques dans une bouche ample et riche et fondue, à la fois fruité, épicé et rafraichissante. Un très beau VSOP qui évolue tout en complexité en bouche. Ça manquerait de plus de degrés pour en apprécier encore plus les subtilités, mais pour 40° il se débrouille déjà excessivement bien! La fin de bouche est moyenne, trop courte même au vu de ce qu’il a donné jusque là, et c’est peut-être le plus dommage.

Un VSOP très séduisant, ample et riche avec lequel on ne s’ennuie pas ; et qui brillerait encore plus avec quelques degrés de plus, surtout pour soutenir une finale bien trop courte. Note: 84

 

 


 

La Mauny XO / 40°

Un rhum « très vieux » de 6 ans et +
il s’agit là de l’ancien XO, et donc de (d’une) l’ancienne bouteille.

 

La robe de ce XO est ambré soutenu tirant sur le bronze, huileux et toujours avec ces jambes gourmandes.

Au nez, on monte encore d’un cran par  rapport au VSOP : concentré et plus complexe, toujours séduisant, élégant. On est sur les fruits confits, caramélisés et pâtissiers, avec une ambiance fumée (tabac brun) qui apporte du sérieux et de la gravité à l’instant. Le chêne est fin et on est bien au-dessus du verre et on pourrait y rester un très long moment. Tout est bien équilibré, justement dosé, avec même une touche florale séduisante.

En bouche, l’attaque est pleine de richesse mais toujours avec classe et élégance, sérieux ; toujours sur le fruit confit, accompagné d’un chêne très bien maîtrisé , d’épices (muscade) tirées au cordeau. C’est compoté et très justement boisé et subtil. La fin de bouche est longue et en parfaite adéquation avec le reste, uniforme, conforme et dans un ensemble fondu, épicé et poivré.

Un XO très agréable, qui pourra souffrir de la concurrence mais qui allie de belle manière les notes confites et classieuses d’un boisé fin. le VSOP était déjà réussi, ce XO est dans la continuité, avec une très belle complexité aromatique. Et encore une fois on ne peut que regretter le degré. Note: 86

 

 


 

La Mauny 7 ans d’âge / 45°

A peu de chose près, un XO, mais des années 80 et affichant un fier « 7 ans d’âge », et à 45° (enfin, hourra) !

 

Changement de décor, la robe de 7 ans est acajou tirant sur le Ruby, grasse aux jambes épaisses et bien moins pressées qu’au présent (mais bien plus collantes).
Au nez, c’est concentré confituré et caramélisé puissance 10, avec un nez presque collant. Nous sommes aussi sur des fruits secs caramélisés: raisins, pruneaux ; des notes grillées, de chêne, et un côté végétal opulent cuit vapeur. Loin d’être désagréable, c’est juste très différent, et beaucoup plus porté sur des notes sombres et pleines de réglisse.

En bouche, passé ce petit goût d’ancien (tendance chêne cartonné) c’est caramélisé sur les fruits secs, et assez réglissé de manière générale. On est loin du rhum agricole, et plus végétal d’aujourd’hui, on est ici sur une réglisse plutôt classieuse, des épices grillées et un caramel noir mais imposant (et pas écœurant au final, juste ‘imposant’). La fin de bouche est moyennement longue, sombre, sur le pruneau et une réglisse fumée qui restera longtemps là tapissée et presque imprégnée.

Mesuré à 35% au lieu des 45 affichés, on ne sait pas si cela vient d’une possible édulcoration (caramel ? mélasse ?) ou d’une conservation qui aurait plus ou moins éventré le rhum. La couleur laisse moins la place au doute, mais n’infirmera rien de plus que des suppositions. En tout cas, c’est une tout autre facette de La Mauny qui est ici dévoilée, moins agricole et plus mélassée. Note: 83

 

 


 

La Mauny 1998 / 42°

Un rhum millésimé mais sans aucune mention d’âge. Il existe une version plus ancienne du même millésime (dans un contenant encore différent). Mais s’agit-il du même rhum? (Laurent nous donne un début de réponse sur son blog)

La robe de ce 1998 est ambré soutenu tirant sur le bronze, brillante et huileuse. Les larmes sont épaisses, nonchalantes et classieuses.
Au nez, le rhum apparait fruité, sur une compotée de pomme parfumée légèrement saupoudrée de cannelle, couplée à une fraîcheur végétale et presque mentholée. Des fruits du verger principalement, délicatement épicés et baignés dans une mixture d’herbes (foin, canne).
Avec le repos, le rhum gagne en  complexité, avec des notes réglissées, de tabac blond, de cacao et une touche florale enivrante (fleur en éclosion, odorante) et plus exotique (banane mûre). On oscille entre rhum vieux et sérieux et rhum parfum à l’allure florale, toujours avec une exquise fraîcheur et une jeunesse opulente.

En bouche, l’attaque est concentrée et même intense mais tout en douceur: sur un mélange de notes acidulées et fraîches (agrumes, résine), épicées (poivre), et encore une fois fruitées, avec le verger à l’honneur: abricot, pêche, poire. Le rhum se fait aussi minéral et on voyage entre intensité et suavité. Très frais en bouche, toujours mentholé, délicieusement fruité. La fin de bouche n’est pas des plus complexes, mais s’avérera persistante sur la longueur, mélangeant fraîcheur et notes épicées, boisées et fruitées. Ça restera longtemps et de bien belle manière.

Un millésime qui apparait assez jeune mais très intéressant et versatile, plus fruité et aérien que le xo qui apparait pour le coup beaucoup plus sombre et simplet (et sucré). Un très beau millésime, assurément, agréable de bout en bout, et très bien fait. Note: 88

 
Les quelques rhums dégustés ci-dessus vont du passable à l’excellent, avec surtout un très bon VSOP et XO (ancien embouteillage), sans compter sur le très séduisant millésime 1998. Pour le reste, ça tiendra plus de l’expérience et du ‘jeu’: certains apprécieront le côté ludique dans la dégustation, avec des expériences qui dépassent de loin le domaine du rhum, y compris dans des rhums ambrés.

Pourquoi pas, même si cela n’augure rien de très bon pour l’amateur de rhum et d’authenticité, surtout quand on sait que même Trois Rivières, pourtant plus sérieux, se lance aussi dans l’aventure du finish avec un, accrochez-vous bien, « Trois rivière ambré finish whisky fût single malt ». Alors, pénurie de vieux ? réelle expérimentation ? ou confiture pour cochon ? les paris sont lancés… On se réconfortera néanmoins avec un La Mauny 2005 sortie conjointement avec la Confrérie du Rhum, qui s’annonce plein de promesses suite à ces dégustations.

 

90 et + : rhum exceptionnel et unique, c’est le must du must
entre 85 et 89 : rhum très recommandé, avec ce petit quelque chose qui fait la différence
entre 80 et 84 : rhum recommandable
75-79 POINTS : au-dessus de la moyenne
70-74 POINTS : dans la moyenne basse
moins de 70 : pas très bon
Comments
2 Responses to “Rhums La Mauny”
  1. Nico dit :

    Merci pour ce tour d’horizon, et pour les explications 🙂 On arrivera peut-être mieux à naviguer dans la gamme désormais. Les expériences un peu poussées me dérangent moins (après tout, tout est dit sur l’étiquette) que le manque d’intensité pour ces nouveaux embouteillages.
    J’ai surtout regretté le côté plus maîtrisé des anciens qui s’affirmaient en tant qu’agricoles juste bien foutus (on n’en demande pas plus !). C’est le cas notamment du VO que j’avais découvert par hasard et avec lequel j’ai passé d’excellents et simples moments de détente.

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    • cyril dit :

      Salut Nico
      la gamme ‘classique’ est toujours un bon baromètre, quoi qu’on en dise 🙂
      pour le reste ce sera une affaire de goût, et perso un finish sur un ambré je trouve ça too much

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