Barba Rum

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Reconnue comme le berceau du rhum et de la plus ancienne distillerie de l’histoire (celle de Mount Gay), l’île de la Barbade abrite 3 autres distilleries, qui ont toutes en commun d’avoir conservé l’utilisation d’alambics à repasse (potstill), en plus de colonnes continues, pour élaborer des rhums puissants aux arômes bien marqués.

A côté de l’authentique Mount Gay, il y a la toute jeune distillerie Saint Nicholas Abbey (qui produit du Pure Single Rum, soit un rhum issu uniquement de potstill), la West Indian Rum Distilery (WIRD) qui distribue le rhum Cockspur, et enfin la distillerie Foursquare de Richard Seale (avec les rhums RL Seale, anciennement Old Brigand, en plus de Doorly, Sixty Six, et des rhums Real McCoy).

 


 

 

 

Cockspur VSOR 12 / 40°

Un ‘Very Special Old Rum’, le plus vieux de la marque Cockspur, qui compte aussi les rhums Fine Rum et Old Gold, tous des assemblages de rhums de colonnes et de potstill. Ce 12 ans est celui qui comporte le plus de rhum issu d’alambic.

Belle couleur ambré, brillante et huileuse.
Au nez c’est un peu astringent, sur un boisé grillé et caramélisé, de la vanille, de l’exotisme opulent (banane, marmelade d’orange), de la coco et un coté fumé/tabac. Plaisant, à la frontière entre rhum et Bourbon.

A l’attaque, c’est assez rond et même moelleux, sur la banane et la marmelade d’orange, le clou de girofle et la cannelle ; le rhum est sec, on retrouve le côté fumé et le caramel pour une bouche très facile, chaleureuse. La fin de bouche est moyennement longue, sur les épices et les fruits, avec des notes de coco et de poivre.

Entre rhum et bourbon, ce Cockspur est sans nul doute un bon point de départ vers la découverte des rhums de la Barbade. On parle beaucoup de Mount Gay, très présent, mais Cockspur mérite tout autant, voir plus, d’attention. Note: 80

 

 


 


Doorly 5 ans / 40°

Une marque produite par Foursquare et Richard Seale, il s’agit d’un assemblage de rhums vieillis 5 ans. Un autre Blended Rum conciliant colonne et alambic à repasse, distillation continue, et discontinue.

La robe est ambrée, dorée, et les jambes assez larges.
Au nez c’est très fin, presque effacé au début, mais cela changera rapidement: de l’orange (zeste), de l’abricot, de la pomme ; c’est vanillé avec un boisé sur le cuir, le tabac. Simple mais naturel. Une odeur de coco grandit dans le verre, de la coco grillée en quantité qui  rend gourmand ce nez dans un pur style de la Barbade.

En bouche, c’est très moelleux, sur l’exotisme et la noix de coco grillée très (très) présente, caramélisée, vanillée et doucement épicée (cannelle, poivre gris), et du cuir. Un rhum très facile et gourmand. La fin de bouche est moyennement longue, encore et toujours sur cette coco grillée, un boisé épicé, et un léger goût métallique sur la fin.

Un nez timide au départ, mais la bouche a la bonne idée de montrer une nouvelle fois tout l’intérêt de conjuguer un rhum de colonne et un rhum plus concentré issu d’un alambic. Belle balance des arômes et très gourmand (sur la coco). Une autre alternative à tous ces rhums sucrés, et une autre belle porte d’entrée pour le novice. Note: 78

 

 



Mount Gay 1703 / 43°

Un assemblage de rhums âgés « de 10 à 30 ans », il s’agit là du rhum le plus vieux de la marque, au côté du non moins célèbre XO.

Belle robe cuivrée, orangée, très huileuse.
Au nez, c’est très fin et délicat, harmonieux. Il y a de l’amande fraîche, de la cire, du tabac ; un rhum complexe, et exotique: banane, orange, melon, mais aussi de la figue ; et toujours cette orange qui décidément revient souvent. On trouve du chocolat avec le repos, et du caramel caramel au beurre salé, très joli! Ajoutez de la vanille, des épices grillées, et vous obtenez un nez complexe et légèrement crémeux, confituré, gourmand mais classieux, sans fausse note.
 
La bouche est très ronde, sans être moelleuse (mais huileuse), et complexe ; Les arômes se développent dans un bel équilibre mélangeant sans écœurement des fruits confits, des épices, de la réglisse, de l’orange, et jamais sans tomber dans la surenchère. Un rhum sophistiqué et bien pensé, très juste. On retrouve même le caramel salé et ce petit côté fumé. La fin de bouche est longue et persistante, sur le café, les fruits murs et un boisé fumé.

Très beau rhum de Mount Gay, bien au-dessus du reste de la marque. La rolls de la Barbade? Équilibré complexe et harmonieux, élégant. Note: 87

 

 


Foursquare Port Cask finish 9 ans / 40°

D’abord vieilli 3 ans en fûts de Bourbon, ce rhum a ensuite passé 6 autres années dans des fûts de Porto. Assemblage de plus de 10 ans d’âge (minimum).

Une couleur bronze/cuivrée, pour une robe bien brillante, grasse et rapidement envahie d’énormes jambes.
Au nez, c’est doux et rond. Un peu pesant avec un léger rancio, une espèce d’âcreté sûrement amenée par la finition en fût de Porto. On retrouve les caractéristiques d’un rhum de la Barbade, avec notamment de la noix de coco grillée, de la marmelade, de la vanille, du caramel, de l’abricot (et de la mangue), le tout englobé dans une ambiance balsamique et boisé. Avec le repos, on retrouve des fruits secs (raisins), et du café en grain.

L’attaque est douce et boisée, mais rapidement rattrapée par la coco caramélisée (et grillée) et les fruits (orange, abricot) qui adoucissent considérablement la bouche. Doux mais pas trop, le rhum restant plutôt sec au final, avec un peu de chocolat, de cannelle, de noix de muscade et de fruits secs (raisins toujours). La fin de bouche est moyennement longue, sur les agrumes, les épices, le chêne et toujours cette coco qui fait son petit effet et qui adoucit les angles.

La distillerie Foursquare propose sûrement les rhums au meilleur rapport qualité/prix, et nous en avons là encore un excellent exemple. Autour de 40€, soit moins qu’un Diplomatico, Zacapa ou d’autres rhums altérés ultra-présent en magasin. Vous avez pourtant avec ce Foursquare un rhum qui passe tout aussi bien (et même mieux), sans écœurement, et qui vous donnera sûrement envie de continuer l’aventure rhum au-delà, de pousser l’aventure un peu plus loin. Note: 85

 

 



Mount Gay Tricentennial / 43°

Sorti en 2003 (à 3000 exemplaires) pour célébrer le 300ème anniversaire de Mount Gay (1703-2003), voici un assemblage de plusieurs millésimes de la marque: 1969, 1974 et 1976. Autour de 200€ à l’époque, la carafe en vaut aujourd’hui quelques milliers.

Le rhum est de couleur acajou, aux reflets rougeâtres ; la robe est huileuse et on distingue nettement un disque vert en surface, signe de maturité. Un spiritueux triste, qui pleure des torrents de larmes nonchalantes.

Au nez, c’est très fin et délicat, et très complexe d’entrée. Pas de luxuriance habituelle mais de la retenue: des notes de fumé ressortent, du café (grain torréfié) accompagnés de vanille et de fruits à coque grillés (noisette, amande), mais aussi des fruits séchés (raisin, pruneau) et de l’exotisme (banane, tarte à l’abricot). Classieux et profond, on sent nettement les années passées en fût, et alors que le premier nez et timide et délicat, le repos donne la pleine mesure du rhum et de son intensité. Des notes de fruits grillés, de caramel (beurré), et de coco ressortent, donnant cette fois de la gourmandise à l’ensemble. Une pointe d’odeur métallique, de cuivre, flotte au-dessus du verre. On est décidément à la Barbade, et quelle complexité.

En bouche, l’attaque est suave et huileuse, et tout de suite assez boisé. On retrouve un mélange de café, tabac, cuir, mélasse brûlée, pour une approche tannique ; une bonne rasade de réglisse noire arrive en bouche pour un rhum plutôt noir et fondu. Et ça continue: amande amère, noix grillés, fruits secs… et un côté acidulé grâce à des agrumes, ou peut-être est-ce des fruits rouges. En tout ça, ça fait sûrement son âge (avancé). Les notes d’amertumes sont minimisées par des notes plus douces pour un très bel équilibre des saveurs. La fin de bouche est longue et chaude, avec un retour sur tout ce qui est noir, du morceau de cuir au pruneau, et une trace  de fumé qui persiste en bouche, et qui restera longtemps après que le rhum soit parti. Nul besoin de vous dire que le verre vide est aussi loquace (boite à cigares, chocolat), y compris le surlendemain.

Assurément un vieux rhum, et sûrement le plus vieux proposé par Mount Gay, même si dire qu’il a 30 ans (comme on peut lire ici et là) serait peut être de trop, cet assemblage n’en est pas moins magnifique. Note: 91

 

 

Comment conclure, si ce n’est en disant que la Barbade produit des rhums très faciles d’accès, plaisants et flatteurs au palais, pourvu que l’on apprécie la noix de coco (un marqueur qui revient assez souvent), tout comme des notes de marmelade d’orange. L’occasion de gouter des Single Blended Rums, ces assemblages de rhums issus de colonne à distiller et d’alambic, un mélange de rhums plus ou moins aromatiques. Et si ce n’est pas suffisant pour vous convaincre, vous pouvez toujours essayer un St Nicholas Abbey de 15 ans pour voir…

90 et + : rhum exceptionnel et unique, c’est le must du must
entre 85 et 89 : rhum très recommandé, avec ce petit quelque chose qui fait la différence
entre 80 et 84 : rhum recommandable
75-79 POINTS : au-dessus de la moyenne
70-74 POINTS : dans la moyenne basse
moins de 70 : pas très bon

 

Comments
17 Responses to “Barba Rum”
  1. Picsus dit :

    Bel article Cyril.
    Bel découverte ce Foursquare! Et hâte de goûter le 1703!

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  2. Jerry dit :

    Salut Cyril

    Tu as tout faux pour le Doorlys 5ans , car ta description concerne le XO !

    0
  3. laurent dit :

    Salut,

    Super idée les articles « par style » ou « région » avec une sélection à prix abordable pour découvrir !

    Cockspur 12 : je l’ai gouté il y a 2 semaines et trouvé atypique, avec un nez presque jamaïcain puis très différent au goût ensuite. Etais-je perturbé , influencé (ou déjà un peu attaqué) par le rhum jamaïcain goûté juste avant ? Il va falloir que je ré-essaye mais il m’a laissé une bonne impression surtout pour ce prix.

    Doorly’s : pas encore gouté le XO, par contre j’ai essayé le 12 ans (à un prix à peine plus élevé) et j’avoue que j’ai moyennement aimé. Il y a un parfum (boisé?) un peu entêtant qui me déplait à un moment, j’ai du mal à le définir. Mais bon en aucun cas ce n’était un mauvais rhum pour autant, simplement pas à mon goût.
    Foursquare Port Cask : goûté aussi récemment. Tu emploies l’adjectif « balsamique », il y a un peu de ça je trouve moi aussi ! Je l’ai préféré au Doorly’s 12 ans mais pour le moment dans la distillerie Foursquare le RL Seale’s reste mon préféré.

    Plus qu’à goûter un Mount gay pour terminer ma formation… :p

    J’attends avec impatience un article sur un autre style 😉

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  4. Jean-Luc dit :

    Hello Cyril,
    Que penses-tu XO de Mount Gay ?

    Je l’ai gouté aujourd’hui, pour moi, c’est pas mal…

    JL

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  5. Yoann dit :

    Bonjour Cyril,
    Au vu de certaines différences de prix concernant les rums Mount Gay observés (une différence de 50 euros sur le même produit peut rendre perplexe…), je me demande si vous aviez eu vent de produits contrefaits sur le marché du rhum en général ? Et notamment via des sites en ligne.

    Et merci de nous permettre de nous enrichir à la lecture de vos articles !

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    • cyril dit :

      Salut Yoann
      Pas à ma connaissance en tout cas ; il y bien eu quelques faux avérés, mais surtout des bouteilles de collection, principalement vendues aux enchères.
      merci

      0
  6. Stéphane dit :

    Bonjour Cyril,

    J’ai découvert ton site il y a peu, je le trouve très instructif et je prends énormément de plaisir à te lire.
    J’ai « réellement » découvert le rhum lors d’un voyage à Cuba en 2001, suivi d’autres voyages dans la zone Caraïbes.
    Ayant vécu sur mes acquis, je souhaitais diversifier ma sélection. Pour ce faire je viens d’acquérir un Admiral Rodney Formidable, un Pusser’s 15 ans et un La Mauny XO hors d’âge (ancien embouteillage).
    J’ai trouvé un Mount Gay 1703 chez un caviste pour 90€ mais le packaging est différent de celui que tu présentes qui lui tourne aux alentours de 140€. Sais-tu m’éclairer sur ce point?

    Merci.

    Stéphane

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    • cyril dit :

      Salut Stéphane et merci beaucoup.
      le packaging a évolué avec le temps, et les prix restent assez différents d’une adresse à une autre (encore plus chez Mount Gay qu’un autre producteur). Dans tous les cas ça reste une valeur sûre

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      • Stéphane dit :

        Salut Cyril,
        Merci pour ta réponse.
        Ce qui est étrange, c’est la relation prix étiquette qui se vérifiait chez différents revendeurs. Au final j’en ai trouvé au Luxembourg, ils avaient également du El Dorado 21 que je gardais à l’œil après t’avoir lu avec une fameuse économie au final.

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