Bielle côté blanc

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Il était temps, mais voici enfin des notes de dégustations de rhums blancs. Généralement dédiés à l’inconditionnel ti’punch et à la mixologie, on le relaye bien trop souvent au rang de simple ingrédient, au lieu de s’y attarder, et mieux encore, le déguster pur ; Pourtant il n’en constitue pas moins la base de tout rhum vieux, et sans une bonne base…

C’est pourtant le produit le plus authentique et traditionnel qui soit, le plus pur et le plus proche de la canne à sucre: fraîchement sorti de la colonne ou de l’alambic qui en aura sublimé son essence, puis laissé reposer quelques mois avant embouteillage (quand le rhum n’est pas embouteillé ‘brut de colonne’), un rhum blanc ne ment que très rarement ; c’est une eau-de-vie qui donne déjà une très belle idée d’une distillerie, et qui reflète parfaitement le travail des agriculteurs et de leur terre.

Un rhum blanc, c’est un rhum nu et sans artifice, encore vierge d’arômes boisés, sans incidence, si ce n’est celui de la canne et de la terre qui l’a vue pousser. Un rhum blanc, enfin, c’est un rhum sauvage et fougueux, à qui le temps n’a pas encore donné d’excuse, et qui a encore tout à se faire pardonner. Il  reflète en ça, tout le travail de l’homme, de l’agriculteur, de son savoir faire, et de son labeur.

Voyage sur les terres de Marie-Galante pour ce premier arrêt, à la distillerie Bielle, et avant de s’attarder plus tard sur celles de Bellevue et de Poisson Père Labat .

 

Bielle 59°

Référence parmi les blancs, primeur au rhum Bielle à son historique taux de 59°.

La robe de ce rhum, huileuse et limpide, laisse se dessiner sur le verre une couronne de gouttelettes filiformes et serrées, nonchalantes et gourmandes.
Le nez est très gourmand et gonflé. Canne sucrée et fruits saturés (banane, mangue), le rhum apparait opulent et bien équilibré. La douceur prime malgré le degré, et des arômes de coco et de vanille flottent au dessus du verre ; le repos apportera des notes rafraichissantes d’agrumes et de cannelle dans une cohésion toujours constante et gourmande, et toujours dans une très belle justesse.

L’attaque est grasse, savoureuse, et délivre un torrent de canne dans une belle concentration aromatique ; le rhum est vanillé et gourmand, sucré, puis épicé jusqu’au poivre qui pique légèrement ; la fin de bouche est sans fin et la maitrise toujours aussi présente.

Une des rolls du rhum blanc pur jus, Bielle 59 est toujours un plaisir, du nez jusqu’en bouche, une valeur sûre. Note: 84

 

 


 

 

Bielle Canne Grise / 59°

Même degré que le blanc référence de Bielle, il s’agit de leur premier rhum mono variétal (une seule variété de canne utilisée, ici la canne grise). Une nouvelle tendance dans le monde du rhum agricole, mais gardons à l’esprit que ce n’est pas la canne le plus important, mais l’attention et les soins qu’on lui donne, en plus de sa fraîcheur.

On est toujours sur le même aspect huileux et multi-gouttelettes.
Au nez, on est face à un rhum vraiment très sec, sur la paille, le chocolat blanc, les herbes, et comme de la poussière. Contrairement aux autres blancs de la marque, plutôt très fruités et proches du zénith, celui-ci donne l’impression de toucher terre, plus proche de la verdure et de l’humidité des sous-bois que de la luxuriance de grands fruitiers. On y retrouve des agrumes et des papayes tombés au sol, en décomposition, âcres, et des arômes plutôt fermiers, de moisissure, avec tout de même un brin de fraîcheur grâce aux agrumes. Un nez en retenu, timide, et qui semble s’éteindre progressivement.

La bouche est douce et onctueuse, laiteuse ; on y retrouve une canne verte et une amertume assez présente et astringente, puis des agrumes, avant de voir déferler des fruits murs et sucrés qui adoucissent considérablement la bouche ; une pointe de menthe poivrée et rafraichissante corse la bouche de belle manière. Même les fruits semblent moisis (papayes très mur). La fin de bouche est poivrée, longue, et persistante.

Un rhum blanc qui sort des sentiers battus, original mais difficile d’approche. Note: 77

 


 

 

Chantal Comte Fighting Spirit RED / 50°

Tandis que la version Blue est un rhum banc qui vient de la distillerie du Simon en Martinique, la version RED provient de Marie-Galante (Bielle).

Robe huileuse opulente, nombreuses gouttelettes.
Le nez est gonflé, d’abord opulent sur la canne sucrée et les fruits mûrs, métalliques, mais rapidement rafraichis par un bouquet d’herbes fraiches, mentholées ; on retrouve beaucoup de zeste d’agrume, pour un nez très frais et végétal, avec une petite touche parfumée de fleur blanche.

En bouche, l’attaque est douce et suave, mentholée, anisée et ‘zestuseuse’ ; puis un fruité qui adoucit modérément la bouche, suivi d’épices qui réchaufferont le palais jusqu’à une finale longue, sur les épices, poivrée.

Un rhum blanc agréable et très frais, marqué par les agrumes et le poivre, et qui fera sans doute son petit effet en ti’punch. Note: 83

 

 

 


 

 

Rhum Rhum PMG / 41°

Voici un rhum produit avec le pur jus intégral de la canne à sucre (sans ajout d’eau), fermenté dans des cuves à température contrôlée (20/22°C) pendant sept à neuf jours. Avant l’embouteillage, RhumRhum repose une année dans des cuves inox. Distillé en alambic à repasse traditionnel (potstill), il s’agit d’un Pure Single Rhum.

D’un blanc huileux, gras, la robe de ce RhumRhum est habillée de nombreux pois laissant s’échapper des jambes amples et lourdes.
Au nez c’est très aromatique et complexe: très fruité et gourmand, avec une grande classe florale. On retrouve une canne opulente et des fruits à chair blanche (pomme granny), de la banane bien mûre, de la pêche plate, de l’ananas, et plus surprenant, des fruits rouges. Au repos, des agrumes (zeste citron vert) et des relent d’olive (longue fermentation) pour un blanc très bien équilibré au nez, et délicieusement parfumé.

L’attaque est excessivement douce et suave, et le rhum caresse littéralement le palais en déposant sur son passage un léger voile aromatique vaporeux ; la dilution se fait sentir, et les 41° offrent une bouche tout en retenue, mais avec suffisamment de gourmandise et de rondeur pour sauver les meubles. Ce sont les agrumes qui sont cette fois à l’honneur, citron vert, zeste, herbes vertes, et la canne dans toute sa splendeur. La dilution met surement l’accent sur ces notes vertes, mais la bouche reste très plaisante et fruitée, avec un petit quelque chose de magique. La fin de bouche est longue, plus épicée (poivre blanc), et avec un beau retour de la canne, et toujours ce fruité à chair blanche et les zestes qui persistent en bouche.

Un rhum blanc très intéressant, qui fait un gros effet malgré les petits 41°, fin et complexe, équilibré à la perfection. Se boit comme du petit lait, frais et fruité. Note: 87

 


 

 

Rhum Rhum PMG / 56°

Même histoire et fabrication que le Rhum Rhum ci-dessus, il s’agit ici de la version ‘brut de fût’.

Un rhum gras, et des jambes rondes qui tapissent rapidement et exclusivement le décor de verre.
Au nez, c’est très concentré, pas de surprise ; l’alcool bloque un peu l’entrée et on comprend tout de suite l’intérêt du 41°, plus parlant pour le coup, plus rapidement en tout cas (pour les pressés). Canne fraîche, fruits blancs (poire) et exotiques, zeste de citrons vert, c’est simple mais tellement bien fait, et très bien équilibré. On retrouve les mêmes arômes que la version réduite, avec en plus des notes de cuir, et du végétal frais (foin), rendant le rhum plus droit et moins exubérant que le 41°, plus ‘noir’.

En bouche, c’est gras et vif, et une nouvelle fois très concentré. Les notes fruitées caressent le palais et le charment, les épices la soutiennent, et les agrumes lui donnent cette touche rafraîchissante et très agréable, presque iodée. Réglisse, anis, vanille, fleur, tout y est pour une dégustation unique. La fin de bouche est très longue, chaleureuse, sur un fruité confituré, et des épices chaudes. Toujours aussi complète et équilibrée.

Un rhum blanc d’excellence, très aromatique, très bien équilibré et savoureux, ce qui en fera un allié des ti’punch, et bien au-delà, un rhum blanc de bouche, à déguster pur. Note: 89

 

 

90 et + : rhum exceptionnel et unique, c’est le must du must
entre 85 et 89 : rhum très recommandé, avec ce petit quelque chose qui fait la différence
entre 80 et 84 : rhum recommandable
75-79 POINTS : au-dessus de la moyenne
70-74 POINTS : dans la moyenne basse
moins de 70 : pas très bon

 

Comments
6 Responses to “Bielle côté blanc”
  1. Nico dit :

    Quelle belle entrée en scène des rhums blancs, voilà un article des plus rafraîchissants ! La qualité de ces eaux de vie « de base » confirme pour celui qui en doutait encore que le rhum fait bien partie des grands spiritueux. Personnellement j’irais même plus loin mais c’est une affaire de coeur 🙂
    As tu eu l’occasion de goûter le « blanc premium » de Bielle distillé deux fois (colonne puis alambic) ?

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    • cyril dit :

      Salut Nico et merci.
      pour le Blanc Premium de Bielle, tu as pu comparer avec le 59 ‘classique’ ?

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      • Nico dit :

        Non justement j’aurais aimé avoir ton avis 🙂
        Sur l’étiquette il est écrit « eau de vie de rhum », je me demande si il pourrait résulter d’échanges de savoir avec Capovilla ou si il existe depuis plus longtemps.

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        • cyril dit :

          tu as sûrement raison, puisque Bielle ne possède pas d’alambic à repasse à ma connaissance, mais 3 colonnes (type Savalle)

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          • Stephan dit :

            Hello, je vous confirme qu’il y a bien sur le site de bielle un alambic. Est ce celui de rhum rhum?? Mais les photos sont sur Google et le parfum de ce rhum est bien plus concentré que le classique. Un réel concurrent à l’esprit de neisson. 😉

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          • cyril dit :

            celui de RhumRhum est sur le site, donc c’est plausible 🙂
            si c’est un réel concurrent de l’Esprit de Neisson, il ne m’en faut pas plus pour succomber, merci.

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