Depaz & cætera

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Direction la distillerie Depaz pour cette dégustation croisée de vieux millésimes, de cuvées et autres carafes. Nous nous attarderons plus en détails sur l’histoire dans une prochaine note, l’occasion de goûter à de nouvelles choses. Bonne lecture.

 

 


 

 

Depaz rhum vieux circa 80′ / 50°

Une mignonnette des années 80 de rhum vieux Depaz proposé à 50° et qui mentionne le « Réserve Spéciale » que l’on retrouvera sur le plus commun et fameux VSOP ; l’étiquette est aussi la même que pour le VSOP, avec une contre étiquette mentionnant un numéro (#076) et un tampon.



Belle couleur ambrée/cuivrée très brillante et huileuse, avec un beau disque gras en surface.
Au nez, on trouve un joli confit rond et gracieux, des fruits secs (raisin, pruneau) saupoudrés d’épices (cannelle, muscade) et de tabac blond, de vanille et d’amande. Le chêne est tendu et la canne encore bien perceptible avec une aura végétale, fraîche et gonflée, sur des souvenirs de sous-bois humide parsemé de champignons. Un joli et séducteur rhum agricole, qui se fait maintenant chocolaté avec le repos, mais sans jamais perdre son origine.

En bouche, l’attaque est huileuse et chaleureuse, très riche et superbement soutenue par les 50°. Mieux encore, le rhum va crescendo et se concentre (gras/miel) dans un ensemble fondu mêlant une canne mature, fruits séchés et épices, en plus d’un tabac qui impose sa stature. Les épices se font plus pimentées et le chêne plus présent, dans une fin de bouche longue et savoureuse sur des notes sèches d’épices et de chocolat. Bon et long.

Un très beau rhum vieux de chez Depaz, végétal et classieux mais qui réussit à proposer de la gourmandise pour un résultat très agréable. La bouche a su garder de sa splendeur et du gras, et à 50° le résultat est parfait. Note: 87

 

 


 

 

Depaz VSOP ‘ancien’ / 45°

Un rhum vieux de chez Depaz, ancienne version : depuis, la distillerie à changer son packaging et jure que c’est le même rhum. L’amateur lui, goûte, et ne s’y retrouve pas. Qui dit VSOP, dit à minima un compte d’âge de 4 ans révolu (3 ans pour un VO et 6 pour un XO), même s’il est ici fait mention d’un assemblage de rhums jusque 7 ans (vieillis en fûts de bourbon et cognac). Une deuxième version, plus récente dans le temps et annoncée plus jeune (4 ans), arbore une capsule/collerette dorée.

 

La robe est ambrée jaunâtre, très huileuse et surmontée de nombreuses jambes élégantes et gourmandes.
Au nez, nous sommes devant un nez très classieux et sensuel, sur un fruit sec (raisin blond, pruneau) épicé et vanillé, relativement sec (bois exotique/santal/tabac) avec une odeur fraîche de noyau, d’amande. Du chocolat avec le repos.

En bouche, l’attaque est huileuse et ample, riche et toujours élégante ; le rhum monte en puissance dans un bel équilibre sur les fruits secs, la réglisse et le tabac blond et le santal, le tout enrobé d’une belle vanille et de notes poivrées qui s’accentuent à mesure que le rhum travaille. Le rhum danse en bouche et il le fait très bien. La fin de bouche est longue, chaleureuse et épicée, poivrée, avec un beau retour de fruits séchés.

Un rhum très bien exécuté au charme suranné ; La bouche surpasse le nez avec une très belle amplitude et une richesse ébouriffante pour prêter à la contemplation. Un rhum de haut vol. Note: 88

 

 


 

 

Depaz VSOP ‘nouveau’ / 45°

le « nouveau » VSOP (nouvelle bouteille, nouveau packaging), censé être le même rhum que ci-dessus. Voyons voir.

Passée une robe un poil plus soutenue que le rhum précédent (et grasse), ce VSOP propose un nez très différent, beaucoup moins complexe que notre bouteille à tête grise, mais vraiment moins. On est  sur du gourmand, du chocolat à gogo avec l’impression de comparer un rhum de prestige à une entrée de gamme pour aguicher le chaland. A registre et époque différente, mœurs et positionnements différents?

C’est charmant, mais la scène ne situe clairement pas dans la même époque, et le nez deviendrait même écœurant à la longue avec un combo chocolat/vanille assez pesant. Ajoutez-y des fruits secs (qui ont des allures de fruits confiturés), un peu de réglisse et un boisé moins bien travaillé.

En bouche, l’attaque est mielleuse, assez concentrée mais une nouvelle fois beaucoup moins complexe et même équilibrée que la précédente. Peut-être ce chocolat qui donne au rhum une bouche ‘décalée’ ? On retrouve les fruits (confiturés), la vanille et les épices qui font parler le poivre, mais avec plus de rondeur, de sucre en bouche, jusqu’à une finale chaleureuse et sèche, mi sucrée mi épicée.

Un VSOP nettement plus rond et moins complexe que son petit frère, plus dans l’air du temps et des palais ‘sucrés’. Dommage, car on perd au passage toute l’âme d’un produit sans imaginer la retrouver un jour. Cela tient-il aux fûts utilisés ? Note: 81

 

 


 

 

Depaz Millésime 1979 / 45°

Un millésime de chez Depaz, comme il en existe quelques-uns, vraisemblablement entre 3 et 6 ans d’âge, sans malheureusement beaucoup plus d’informations.

 

la robe est très ambrée, assez claire et toujours brillante, grasse et toujours surplombé d’un beau disque gras.
Au nez, nous sommes sur un profil nettement plus végétal, avec sans doute un rhum plus jeune que celui du dessus, sur une canne fraîche et un panier de fruits du verger (pomme, pore) matures et gorgés de sucre, voire passés. Avec le repos, le profil végétal revient, vanillé et légèrement poivré. Opulent et frais.

En bouche, l’attaque est mielleuse et riche, grasse ; on retrouve nos fruits qui apportent une bouche sucrée et des épices qui réchauffent considérablement l’ambiance, accompagnées d’un boisé un poil astringent. Un rhum jeune mais riche et une fin de bouche relativement longue et plaisante, sèche et fruitée.

 

Un Depaz plus végétal mais qui sait garder une nouvelle fois une bouche concentrée et vivante, dans un bel équilibre. Simple et efficace Note: 83

 

 


 

 

Depaz Grande Réserve XO / 45°

Il existe plusieurs versions de ce XO Grande Réserve; celui-ci n’est pas le plus récent et sans doute pas le plus vieux non plus. On parle ici d’un assemblage autour des 12 ans. Nous vous renvoyons vers l’excellent site Référence Rhum pour plus d’informations (photo excellence rhum).

 

La robe est ambrée, tirant sur le bronze, grasse et habillée de belles jambes dodues.
Au nez, c’est très classieux à la Depaz, avec ce mélange sec et très harmonieux de fruits séchés (pruneau, banane, papaye), de vanille et de boisé très fin et chaudement épicé (cannelle, muscade). C’est d’une douceur certaine, entêtante, très fine et séduisante. Le repos apporte des notes de tabac et de cacao qui se mélangent superbement aux fruits, plus exotiques.

En bouche, l’attaque est douce et soyeuse, aussi séduisante (si ce n’est plus) que le nez. Les fruits vanillés sont fondus et ne font qu’un avec ce chêne, plus viril qu’au nez, toujours épicé (cannelle et clou de girofle) et même poivré. C’est assez riche et la concentration va crescendo ; les épices prennent alors le dessus, tout comme le chêne (réglisse) et maintenant des notes de tabac qui assombrissent un peu plus la bouche et lui donnent de la vivacité.
La fin de bouche est moyennement longue, assez sèche sur ces dernières notes qui persistent, avant de retrouver quelques fruits séchés.

 

Le nez montre la maîtrise de Depaz et nous propose une très belle harmonie, très juste. La bouche propose une longueur toute épicée et boisée, plus sèche mais vive et concentrée. Un beau rhum bien maîtrisé qui fait sans doute plus jeune que l’âge avancé. Note: 84

 

 

 


 

 

Depaz Cuvée Prestige / 45°

Un « très vieux rhum » en carafe « prestige » ; passée cette information assez vague, on ne connaît malheureusement que trop peu de chose sur ce rhum. Peut-être qu’un jour, à l’instar d’autres maisons, on en apprendra d’avantage, peut-être même à la hauteur du prix demandé?



Belle couleur ambrée, vieil or et robe huileuse. Ça brille et c’est beau.
Au nez, plus végétal et floral qu’à l’accoutumé, peut-être même plus jeune? C’est une nouvelle fois assez fin et délicat, plutôt sec : sur les habituels fruits séchés (pruneau, datte, agrumes), les épices (cannelle et muscade), et un chêne légèrement grillé et vanillé (réglisse). Ça manquerait presque de puissance ou en tout cas de concentration pour faire la différence, à la limite de tomber dans l’ennuyeux.

En bouche, l’attaque est douce et sirupeuse, ronde et chaleureuse. Il y a ici nettement plus de concentration et de profondeur que le nez, c’est même assez ample et surtout très plaisant: épices, chêne et fruits se mélangent et se confondent dans un ensemble mielleux/confituré et sucré (sucre roux, réglisse), mais avec aussi du tabac et des épices qui grandissent (poivre, muscade), et même une belle fraîcheur mentholée. Bel équilibre et belle concentration. La fin de bouche est plutôt gourmande, entre fruits séchés (exotique, ananas), épices (cannelle) et réglisse.

Un Depaz au profil plus pâtissier et beurré, plus accessible et plaisant que la moyenne sans doute. Il a tout pour plaire (comprenez très accessible) et vous faire tomber en amour avec Depaz, tout du moins en bouche. Note: 87

 

 


 

 

Depaz Vieux circa 80/90′ / 45°

Une mignonnette qui date sans doute de fin 80 début 90 d’un rhum vieux à 45°.


Robe ambrée/acajou, très lumineuse et huileuse (beau disque en surface).
Au nez, on retrouve un Depaz plus profond et nettement plus sombre qu’à l’accoutumé : sur la réglisse, la mélasse bien noire (tabac, cuir) et les épices (cannelle). On imagine une sorte de mixture à base d’herbes fraîches (canne) et de mélasse avec un brun de fraîcheur (menthe) et des fruits à coques grillés. Le pruneau est assez présent aussi, noir de chez noir.

C’est très agréable mais au final assez loin (très loin même) de la finesse actuelle (ou en tout cas celles des années 90, début 2000), même si le rhum agricole n’est jamais bien loin. Chaud et épais.

En bouche ? c’est huileux et même gras assez rapidement : concentré, toujours sur cette réglisse/mélasse, survitaminé et épicé, boisé. Ça chauffe en bouche, toujours dans la même ambiance que le nez, sur fond d’épices et de chêne grillé, de tabac et de canne brûlée ; de fruits séchés (pruneau) et de sucre brûlé.
La finale est assez longue et surtout persistera sur la mélasse et la réglisse, encore et encore, et pendant un très long moment… A noter une belle fraîcheur qui évite de tomber dans le trop noir
.

Un Depaz aux antipodes d’aujourd’hui, et sûrement dans l’air du temps (de l’époque) avec un profil plus sombre et orageux. La réglisse domine, et avec lui le souvenir des premiers VSOP. Note: 86

 

 


 

 

Depaz Cuvée Victor / 41°

Un rhum ‘hommage’ au grand Victor Depaz, sous la forme d’un assemblage de différentes cuvées ayant maturé 3 à 4 ans dans de petits fûts de chêne américain (Bourbon). Pourquoi 41° ? pourquoi pas.


Robe vieil or ambrée, brillante et huileuse.
Au nez, on est une nouvelle fois dans cet esprit Depaz 2.0, beaucoup plus facile sur les fruits au sirop, la pâte de fruits exotiques (ananas, agrumes, pêches), plus sur la gourmandise que sur le cérébral. Un exotisme gonflé et confit, du miel, de douces épices et un boisé d’une belle finesse qui tire de plus en plus sur le chocolat. Doux et séduisant, manque juste de répondant…

En bouche, c’est doux et légèrement huileux, fondant et…avec du répondant! Là où la bouche laissait imaginer un coup de mou la bouche sait réveiller les ardeurs, l’exotisme se mélange harmonieusement à un boisé plus taquin, des épices poivrées et nous rappelle l’origine du rhum dans une belle amertume végétale et une fraîcheur d’agrume. Une bouche grasse et gourmande, sur le fruit séché (pruneau et toujours de l’exotisme). La fin de bouche persistera doucereusement et très fidèlement au début de dégustation, avec en prime du chocolat sur la toute fin.


Un Depaz très gourmand et assez gras, sur la pâte de fruit, et avec une bouche qui offre suffisamment d’intérêt pour éviter de tomber dans l’ennui. Au final, voici un rhum agricole très facile d’accès à qui il manquerait tout de même plus de complexité. Un hommage tranquille. Note: 82

 

90 et + : rhum exceptionnel et unique, c’est le must du must
entre 85 et 89 : rhum très recommandé, avec ce petit quelque chose qui fait la différence
entre 80 et 84 : rhum recommandable
75-79 POINTS : au-dessus de la moyenne
70-74 POINTS : dans la moyenne basse
moins de 70 : pas très bon
Comments
4 Responses to “Depaz & cætera”
  1. Georges dit :

    Merci Cyril ! Le sentiment que Depaz n’a pas retrouvé son niveau d’avant incendie… lien erroné ? Il leur a fallu une sacrée dose de patience , de courage et de passion pour faire face aux problemes de stocks (et sans doute de liquidités) . Cette épreuve aurait elle eu raison de la magie Depaz ou est ce un changement volontaire d’orientation ?

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    • cyril dit :

      Salut Georges
      La magie Depaz est toujours là, mais différente. Je pense surtout à des méthodes de production différentes, et sans doute à une adaptation, et ce n’est pas la seule maison dans ce cas. Autre temps autres rhums autres profils

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    • Alexis dit :

      Salut à tous,

      Depaz reste une très belle maison, il n’est pas mentionné dans l’article, mais je crois qu’il reste assez disponible, accessible et qu’il fait quasiment unanimité c’est le Depaz 2002!

      Un de mes coups de cœurs l’année dernière

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