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Que ce soit en Guadeloupe, ou même ailleurs, Reimonenq est partout. Avec un stock de rhum vieux qui dépasse largement le millier de fûts, rares sont les distilleries à proposer autant de rhums âgés, et de millésimes ; il n’est donc pas étonnant d’en retrouver dans des assemblages d’autres distilleries (dépourvues de stock), même si la bienséance (et l’argent) impose religieusement le silence. Mais on trouve aussi du Reimonenq via de petits embouteilleurs (ou cavistes) indépendants, dont Rhum House et JB labat en Suisse. Une bien belle manière de goûter à des degrés moins classiques, avec, ci-dessous, 47, 56.7 et 52.6°.
Rhum House Millésime 2008
D’après les informations de l’embouteilleur, ce rhum a été mis en fût en janvier 2008 à la distillerie Reimonenq en Guadeloupe, puis a été envoyé à Genève le 22/10/2011 en tonneau d’origine (56%) avant d’être embouteillé le 03/07/2013 et réduit à 47% (en 300 bouteilles de 50cl).
Nous sommes donc face à un rhum ayant vieilli entre 3 et 4 ans à la distillerie, puis quasiment 2 ans de plus en Suisse.
Dans le verre on trouve un rhum ambré, brillant, plutôt huileux et aux jambes moyennement épaisses
Il a besoin de s’aérer plusieurs -longues- minutes avant de dévoiler toute sa palette. Des notes de fruits, confits, de bonbons à la pêche (bonbons gélifiés sucrés), de caramel mou, mais aussi végétales (herbe fraîche), des zestes d’agrumes (citron) confits là aussi, et un paquet d’épices (cannelle, cardamome), des feuilles de tabac séchées, et le tout… chocolaté. On retrouve l’exubérance des Reimonenq, ça part dans tous les sens, mais avec plus de pep’s, les 47° rendant l’ensemble moins écœurant qu’à l’accoutumé. On est sur un rhum plus sobre et plus marqué par le fût, plus grillé aussi, plus torréfié.
L’attaque est douce, grasse et très riche ; on retrouve les fruits, les agrumes, de la menthe et du chêne très présent (bois grillé et caramélisé), et même un goût fumé persistant (comme brûlé, et même braisé). Le tout dans un mélange qui s’apparente plus à une sorte de résine, de plus en plus boisée, brûlée et poivrée.
La fin de bouche est très longue, sur les mêmes notes : d’abord le sucré des fruits confits, puis le bois, grillé, et les épices poivrées et soutenues, avant de revenir sur des notes boisées, et végétales (herbes).
Le nez est très sympa, fidèle à ce que peut proposer habituellement Remonenq, avec un degré qui donne suffisamment de force pour éviter l’écœurement. En bouche, c’est riche et ça part dans tous les sens, mais peut être trop marqué par le fût, avec en fond tout de même ce qui plait tant chez Reimonenq. C’est bon mais ça manque d’équilibre. Note: 85
Rhum House Millésime 2007
Cette fois, le rhum a été mis en fût en janvier 2007 chez Reimonenq, puis envoyé à Genève le 20/08/2013 en tonneau d’origine ( 200 litres à 56.7%) et sorti du tonneau le 17/03/2014 au degré naturel (200 bouteilles de 50cl). Ce rhum a donc été vieilli en Guadeloupe entre 6 et 7 ans, puis 7 mois supplémentaire en Suisse.
On est sur une couleur strictement identique que pour le 2008, rien de plus, ni de moins.
Au nez, c’est beaucoup moins exubérant que le précédent, plus contenu, et pour cause: le fort degré bloque un peu l’entrée. On retrouve le côté végétal, caramélisé, et toujours marqué par le fût, mais on a du mal à aller au delà et passer outre les 56,7°, qui semblent fermer le nez au lieu de le faire exploser avec tout ce que l’on attend de chez Reimonenq. Une bonne dose de repos lui apportera quelques notes plus rondes et gourmandes de caramel, de vanille, de cannelle et de chocolat. Le temps est son allié, mais l’alcool reste trop présent, cassant l’ambiance.
L’attaque est huileuse, riche, et très puissante ; bois et épices s’en donnent à cœur joie, un côté salé/iodé, et les fruit qui apportent un peu de sucrosité mais cela reste fortement épicé (poivré, pimenté), boisé (copeaux de crayon de papier), moins résineux mais toujours huileux et fondu ; ça va crescendo dans le feu en bouche, mais c’est chaud…trop. La fin de bouche est longue, persistante sur les mêmes notes, toujours puissante et…boisée.
Bien en dessous du 2008, car l’alcool est vraiment trop dominant pour que ce soit vraiment agréable, en tout cas pour du Reimonenq. C’est puissant oui, mais la puissance ne fait pas tout, bien au contraire, elle annihile ici les arômes, et les 56,7° ne semblent pas bien intégrés… Note: 80
Reimonenq by JB Labat (2009)
Ce rhum nous vient d’une boutique située à Zurich (JB Labat) qui fait directement venir des fûts de Guadeloupe et qui les embouteille directement en boutique. ce rhum a été distillé en 2009 puis embouteillé en 2014, après avoir vieilli un an en Suisse dans un petit fût fabriqué pour l’occasion.
On a donc 4 ans de vieillissement en Guadeloupe (en fût de 200l) et 1 année en Suisse (et plus précisément la moitié du fût original 11 mois à Zurich dans un fût de 100l fabriqué pour l’occasion, à la main, en provenance de Jamaïque ou du Guyana). Pour un rhum titrant 52,6°.
Couleur ambré, reflets bronze, aspect huileux.
Le nez est plutôt sec et beurré, et l’incidence du fût (bois sec) est une nouvelle fois bien présente. On est loin de la folie habituelle de Reimonenq, c’est plus sobre, et on en attend forcément plus, surtout avec 52,6° au compteur. C’est végétal (herbe, citronnelle), avec de l’anis, du chocolat blanc. Le repos semble mettre en avant un côté boisé fumé, légèrement réglissé. Et avec encore un peu plus de repos, des fruits rouges (grenadine). Le nez se transforme progressivement, pour finir par devenir enfin intéressant.
La bouche est chaude et onctueuse, huileuse, concentrée et tonique, et rapidement très épicé. une sève mélangeant herbes, réglisse et épices, devenant même pimentée et piquante. Des fruits exotique sont aussi de la partie, mûrs à point, et apportent de la douceur à l’ensemble. La fin de bouche est gourmande et végétale, excessivement longue, relevé par les épices (réglisse, piment, tabasco) et une légère amertume (feuille de tabac).
Un nez qui met beaucoup de temps à émerger, mais une bouche et une fin puissante et longue qui marque la différence. Moins alcooleuse que les sélections de Rhum House, on retrouve tout ce que Reimonenq a à proposer de meilleur, avec en prime une bouche puissante et caractérielle, épicée et plus brute, mais toujours un poil trop puissante. Note : 83
Très intéressantes dégustations, qui étrangement laissent penser que Reimonenq n’est jamais autant Reimonenq qu’avec des embouteillages beaucoup plus classiques, à un degré plus faible. Ces exemples de brut de fût et de hauts degrés ne semblent pas lui réussir tant que ça, délivrant un paquet de bois et d’épices, tout en puissance et avec une certaine astringence qui laisse sur la faim.
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